Télévision : Les 10 séries qui nous ont conquis en 2024
- Écrit par : Romain Rougé
Par Romain Rougé - Lagrandeparade.com/ Non, ce classement ne fera pas apparaître les décevantes dernières saisons de What We Do in the Shadow et Evil ou encore la quatrième saison jouissive mais un brin répétitive de Slow Horses. Pour autant, il y a eu du très bon côté séries en 2024. Voici notre classement, toujours aussi subjectif.
10. Fargo – Saison 5 (FX / Canal+)
Si elle se retrouve au pied du classement, c’est uniquement parce que le cinquième opus de cette brillante anthologie télévisuelle a été diffusée à cheval entre 2023 et 2024. Car c’est certain, cette saison signe un retour en force de la série qui s’est emparé avec audace et brio de la thématique des violences faites aux femmes. On y retrouve Juno Temple et Jon Hamm qui excellent, une ambiance halloweenesque, une Amérique abîmée par l’ère trumpienne ou encore un déroutant mangeur de pêchés… Bref, dix ans après sa première saison, Fargo est toujours aussi jouissive dans sa loufoquerie comme dans son sérieux, dans sa forme comme dans son fond.
9. Culte – Saison 1 (Prime Video)
Bienvenue dans les coulisses de l’émission qui a chamboulé le paysage audiovisuel français. En 2001, Loft Story débarquait sur M6 avec le tourbillon médiatique qui l’a accompagné, entre adulation et répulsion. Culte reprend les grands enchaînements de la naissance à la conclusion de l’émission à travers les personnages qui en ont été les « héros », de Loana à Alexia Laroche-Joubert. Si les six épisodes font avance trop rapide sur les semaines de diffusion de l’émission, ils sont suffisamment brillamment écrits et incarnés pour faire de ce Culte très addictif une des meilleures séries françaises de l’année.
8. True Detective: Night Country (HBO)
Délocalisée sur les terres sombres et glacées de l’Alaska avec une dose de moins de testostérone, la nouvelle saison d’une des prestigieuses séries HBO a réussi sa transition, notamment grâce à son duo de téméraires enquêtrices (incarnées par Jodie Foster et Kali Reis) et ses décors de fin du monde. Si l’enquête à la lisière de l’ésotérisme sent parfois le réchauffé, sa résolution intelligente qui fait appel à notre imaginaire est savamment amenée. À la manœuvre, Issa López, nouvelle showrunneuse qui a repris le flambeau de Nic Pizzolatto en lorgnant davantage du côté de Twin Peaks ou d’X-Files. Nous ne sommes pas au niveau de l’inoubliable saison 1, mais on s’en est rapproché.
7. Acapulco – Saison 3 (Apple TV+) / Shrinking – Saison 2 (Apple TV+) / The Big Door Prize – Saison 2 (Apple TV+)
Difficile de départager ces trois pépites de comédies qui savent si bien – chacune avec un style très différent – philosopher sur nos vies contemporaines. Shrinking, Acapulco et The Big Door Prize ont poursuivi leur petit bonhomme de chemin en évoquant avec intelligence et tendresse ces passés qui ne reviendront jamais.
Trois séries ceintes d’une douce mélancolie, ancrées dans le présent, ultra réconfortantes, à consommer avec modération pour en apprécier toute la teneur réparatrice. Une dose de lâcher-prise bienvenue dans une année 2024 débordante de morosité. Une mauvaise nouvelle cependant : The Big Door Prize a depuis été honteusement annulée, sans résolution, au terme de sa deuxième saison.
6. Ripley (Netflix)
Après Beef l’an dernier, Netflix nous refait le coup de la minisérie magistrale que l’on n’attendait pas. La révélation Ripley, c’est un Andrew Scott qui crève l’écran, métamorphosé en inquiétant usurpateur à la prestance reptilienne. L’histoire se déroule cette fois dans un univers noir et blanc ultra soigné qui vient sublimer les faits et gestes de ce prédateur imperceptible. Visuellement, Ripley est un somptueux voyage immersif et contemplatif, qui plus est dans une Italie fellinienne, fantasmée et intemporelle. Mais c’est surtout une captivante et redoutable plongée dans la psyché humaine.
5. Sugar – Saison 1 (Apple TV+)
À l’instar de Ripley, Sugar repose sur un personnage complexe et énigmatique, évoluant cette fois dans un Los Angeles néo-noir mâtiné de fantastique. Mais a contrario, Apple TV+ n’a (pour une fois !) pas adapté un livre ou un film : cette création originale bien que très référencée (ah, ces jubilatoires hommages aux films noirs !) est tout droit sortie de l’imagination du cinéaste Mark Protosevich à qui l’on doit The Cell, I Am a Legend ou encore Thor. Si l’intrigue principale (la disparition de la fille d’un producteur hollywoodien) perd vite de son intérêt, Sugar vaut pour son ambiance envoûtante, son jeu d’acteur (fascinant Colin Farrell) et son twist scénaristique aussi inattendu que génial…
4. House of the Dragon – Saison 2 (HBO / Max)
C’est vrai, le final est un tantinet anticlimatique. Mais là où la première saison pêchait un peu par orgueil, cette saison s’assume en s’éloignant de la barbarie gratuite et des excès de grandiloquence. Portée par une galerie d’extraordinaires personnages aux ambitions aussi démesurés que leurs dragons, House of the Dragon devient un grand spectacle devant lequel on reste souvent le souffle coupé. Plus centrée sur l’action de ses protagonistes - en premier chef(fe) Rhaenyra Targaryen (l’épatante Emma d’Arcy) – la saison 2 est aussi une passionnante réflexion sur les héritages génétiques et familiaux. À plusieurs reprises cette année, House of the Dragon a prouvé qu’elle n’est pas un simple prequel de Game of Thrones, particulièrement avec les épisodes « The Red Dragon and the Gold » et « The Red Sowing », petits chefs d’œuvres qui la hissent aisément au niveau de la série mère.
3. Interview with the Vampire – Saison 2 (Paramount+)
La saga vampirique adaptée des romans d’Anne Rice maintient son niveau de qualité en pulsant au rythme d’une identité queer assumée et décomplexée. Interview with the Vampire prend toujours le temps de raconter son histoire, nuançant des personnages toxiques pour en faire des créatures complexes dévorées par une angoisse existentielle ou la rage d’aimer. La série repose d’ailleurs beaucoup sur l’alchimie magnétique de ses acteurs : un charme qui opère derrière l’écran jusqu’à nous repaître de scènes dramatiques d’une intensité folle (la tentative de suicide de Louis, la disparition de Claudia, le face-à-face déchirant entre Louis et Lestat dans le dernier épisode…). Si l’absence de Lestat (l’impeccable Sam Reid) se fait néanmoins un peu sentir tout au long de la saison, la finesse de l’écriture et la justesse de l’interprétation élèvent le deuxième chapitre de la série au rang des meilleures productions actuelles.
2. Somebody Somewhere – Saison 3 (HBO / Max)
Somebody Somewhere n’a qu’un seul défaut, celui d’être trop courte ! En 7 petits épisodes, la dernière saison de ce bijou télévisuel nous conduit vers l’acceptation de soi et des autres, ce qui restera, in fine, l’épine dorsale de la série. Si l’ombre du deuil et les mille et une façons de le gérer a toujours plané sur les épisodes, en véritable ode aux inadaptés qu’elle est, la série a su épaissir son histoire et ses personnages, abordant la différence avec une authenticité et une sincérité rarement atteintes à la télévision. Émouvante, attachante, drôle et très humaine, Somebody Somewhere brosse également le portrait d’une Amérique rurale, loin des clichés qui la disent peuplée de ploucs décérébrés. Voici des quidams avec des rêves et des peines, à l’évolution lente et mélancolique, pour qui les grands plaisirs de la vie peuvent se résumer à un donut dégusté au resto du coin ou à une longue balade dans les prairies infinies du Kansas.
1. Industry – Saison 3 (HBO / Max)
Avec son ossature tech striée de trahisons shakespeariennes, relations brutales et revirements épiques, Industry est une épopée brûlante sur les arcanes froides et inhumaines de la haute finance londonienne… Si le jardon financier est toujours imbitable, le tour de force de la série réside à provoquer chez nous un incompréhensible attachement à ces jeunes et ambitieux traders « kervielesques », eux-mêmes victimes de la broyeuse dans laquelle ils sont jetés... Dans cette remarquable saison, Industry poursuit son exploration d’un monde qui pourrit de l’intérieur en jetant l’opprobre sur les déboires personnels et professionnels des protagonistes, toujours shootés à l’ambition et au profit, pétris de cynisme exacerbé et acteurs ramifiés à une financiarisation tentaculaire du monde. Mais Industry, c’est aussi (et surtout !) la série qui a fait émerger deux puissants personnages féminins, nous faisant clairement basculer dans un changement de paradigme : exit les Walter White, Don Draper, Tony Soprano, Dexter Morgan ou Vic Mackey des années 2000/2010, place à ces stupéfiantes antihéroïnes des années 2020 que sont Yasmin (Marisa Abela) et Harper (Myha'la Herrold).
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