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Ashkal : un polar tunisien haletant et mystique

  • Écrit par : Romain Rougé

askhalPar Romain Rougé - Lagrandeparade.com/ Présenté dans la compétition longs métrages du 44e Cinémed, le film suit l’enquête de deux flics sur la piste de corps calcinés dans la Tunisie post Ben Ali.


Accrochez vos ceintures, voici Ashkal, thriller tunisien vertigineux ! Le réalisateur Youssef Chebbi s’inspire de l’immolation de Mohamed Bouazizi qui a déclenché le printemps arabe en 2010 (et de celles qui continuent encore aujourd’hui en Tunisie) pour construire une histoire d’un saisissant ésotérisme…

En première ligne, les personnages de Fatma (interprétée par l’incandescente Fatma Oussaifi) et de Batal (non moins ardent Mohamed Grayaâ). Si Fatma est une enquêtrice valeureuse dotée d’une curiosité naturelle, Batal est un pur produit de l’administration. Elle ne s’interdit pas de croire en la magie pour résoudre l’enquête. Lui est encore prisonnier d’un ancien système corrompu qui va devenir le carburant de cet incendie perpétuel. De passage au Cinémed, l’interprète de Fatma se réjouira d’ailleurs (à raison) d’un rôle de femme forte « qu’on voit rarement dans le cinéma arabe. » 

Autre élément central du film : son décor. « Les Jardins de Carthage » est un quartier de Tunis créé par l’ancien régime dont la construction a été brutalement stoppée. Un lieu froid et minéral qui va magnifiquement servir le récit et naturellement s’opposer à la chaleur des corps embrasés. Un contraste en clair-obscur bien exploité par le réalisateur, nous offrant au passage quelques plans d’une beauté infernale. Des immeubles abandonnés qui sont nous dit-on situés à proximité des ruines de Carthage, elle-même détruite par le feu… Il n’y aurait donc pas de hasard dans Ashkal ? « Le système mis en place par l’ancien régime brûle. Le motif de l’immolation dans le film est une pure fiction qui prend comme base de départ des éléments de la Tunisie contemporaine », commente le réalisateur.

Reste le mystère lynchéen des torches humaines. Un personnage inquiétant, sans visage, va mettre en doute les croyances et les convictions des enquêteurs désabusés. « Les immolations ont une portée sociale et politique, mais le passage du feu d’un personnage à un autre est plus philosophique et spirituel : on peut voir l’incendiaire comme une figure religieuse ou simplement libératrice, quelqu’un dont on ne comprend pas les motivations, qui échappe à notre compréhension », explique Youssef Chebbi. Ce feu, semble-t-il sacré, aussi destructeur que libérateur, a trouvé un hôte : ce dernier est-il anarchiste ? Terroriste ? Ange ou Démon ? Les immolés atteignent-ils une Révélation, une Élévation ou vont-ils directement en Enfer ? Le film regorge de ces questions métaphysiques qui nous transcendent longtemps après le visionnage... L’Apocalypse selon Ashkal aura lieu dans les salles le 25 janvier 2023, courrez-y !

Ashkal
Réalisé par Youssef Chebbi
Avec Fatma Oussaifi, Mohamed Grayaâ
Distribué par Unifrance
Sortie en France : 25 janvier 2023

Bande- annonce :
https://www.youtube.com/watch?v=hkzq763OiRA

La comédienne issue de la danse, dit avoir appréhender ses mouvements pour traduire les émotions de son personnage.


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