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« Le roi des cendres » de S.A Cosby : un polar sans grande originalité...

  • Écrit par : Guillaume Chérel

le roi des cendres Par Guillaume Chérel - Lagrandeparade.com/ « Le Sang des innocents », précédent roman (noir) de S.A. Cosby, fut lauréat du Grand Prix des lectrices de Elle 2024.

Un « génie », dixit Olivia de Lamberterie, chroniqueuse littéraire avertie à Télématin (France 2), qui l’annonce S.A comme le nouveau « patron du polar ». un « génie », Mazette ! Cet écrivain afro-américain se serait « définitivement » imposé comme le nouvel « auteur incontournable » du polar US. Même Dennis Lehane, grand connaisseur, s’il en est, y est allé de son compliment : « Le roman noir a un avenir, et cet avenir s`appelle S. A. Cosby ». Il s’agissait de son précédent livre, dans lequel il abordait (déjà) la question des liens familiaux, à travers une intrigue à la fois palpitante et terriblement humaine, qui dressait un état des lieux – sans concession aucune – de l`Amérique contemporaine. Il était question de « chef d`œuvre »….

Nous vivons non pas une « drôle d’époque », mais au contraire une sale période où les mots ne semblent plus avoir de sens. Qu’il soit considéré comme l`une des voix les plus « musclées, originales et captivantes » de la fiction contemporaine », par The Washington Post, soit. Mais ici, en France, où la Série Noire est publiée par les éditions Gallimard, la NRF - « ze » grande maison (Blanche, comme le genre littérature générale) -, on sait reconnaitre un authentique écrivain à son style (sa voix singulière). Pas simplement parce qu’il est doué pour raconter des histoires, sur plus de 500 pages, en enfilant des phrases, comme des perles, déjà lues et relues. Ou qu’il a le look dur-cuir (hard-boiled), Le comparer à Dashiell Hammett, comme l’a écrit son éditeur, est non seulement une hérésie, mais ridicule. Chester Himes, à la rigueur… Mais il manque l’humour et surtout d’engagement politique. Même dans les non-dits (relire Hemingway et Cormac McCarthy, les maîtres du genre).

De quoi s’agit-il, dans « Le roi des cendres » ? Roman (afro-américain au nom prédestiné) est à la tête d`une entreprise de gestion de patrimoine à Atlanta. Lorsqu’il apprend que son père a été victime d`un accident de la route, il revient à Jefferson Run », surnommée « Jefferson-la-ruine, petite ville de Virginie, où il a grandi. Une fois sur place, il doit remettre le nez dans les fameuses « histoires de famille », citées plus haut. La mystérieuse disparition de sa mère (qui aurait eu un amant), et l`entreprise de pompes funèbres de son père, dont il n’a jamais supporté l’odeur de mort, colportée par l’incinérateur. Et surtout, la galère de Dante (encore un nom littéraire, gros sabots), ce petit frère qui s’est mis dans un sacré pétrin. Il y a aussi sa sœur, qui le culpabilise (on se croirait dans une série TV), parce qu’il les abandonnés.

S.A Cosby a le mérite de décrire cet ancien « fleuron industriel » devenu une ville en perdition, gangrénée par la pauvreté, la violence et la drogue. Mais comparé à Chris Offutt, David Joy, Ron Rash, entre autres, qui font ça avec maestria, et poésie, malgré la dureté des faits relatés, dans le Kentucky (Appalaches), ce énième « thriller » tire à la ligne (quand Roman s’assoit dans la cuisine, il tire la chaise, avant d’ouvrir le frigo, puis il se souvient de sa jeunesse en flash-back). Les scènes d’action sont cousues de fil blanc. Les méchants débarquent comme des éléphants dans un magasin de p… Le traducteur n’est pas en cause. C’est le genre (prémâché pour une éventuelle adaptation ciné ou télé qui veut ça, chez les « faiseurs » qui espèrent le jackpot). Seule originalité, le seul flic en scène est un c… fini. Pas de détective alcoolique. Le citoyen Roman va devoir se débrouiller tout seul (enfin, avec l’aide d’un ami, ancien soldat, tout de même), pour se tirer d’affaire, lui et sa famille (ou ce qu’il en reste) : la sacro-sainte famille. Home ! Home ! Home ! US Go home…

Le fond est là (contexte US, violence, trafique de drogue) mais la forme laisse à désirer. Répétons-le, c’est du déjà lu. Pas étonnant qu’un auteur best-seller comme Michael Connelly affirme, lui aussi, qu’il est « l`héritier du « thriller américain, et de tous les romans forts et marquants. ». Lisez, ou relisez Lehane, cité plus haut. Et Offut, Crumley, Westlake, Hammet, Chandler, Himes, vous verrez la différence. Chaque année, on nous fait le coup de la révélation du roman noir américain, comme celui (ou celle), du « polar scandinave ». Ce n’est que du marketing. De la communication. On vous aura prévenus.

Le roi des cendres 
Editions : Sonatine
Auteur : S.A Cosby
Traduit de l’anglais (américain) par Pierre Szczeciner
544 pages
Prix : 23, 50 €
Parution:  2 octobre 2025

 


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