Le mal en soi : un thriller à l’intrigue classique, dans une Italie rurale très bien rendue
- Écrit par : Sylvie Gagnère
Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.fr/ Automne 2016, Castellacio, un petit bourg du sud de l’Italie. Le cadavre d’une jeune femme a été retrouvé pendu par les poignets à un saule, tandis que sa tête tranchée gît entre les racines. Damanio Valente, le Chacal, journaliste et auteur à succès de « true crime » est sur les lieux. L’homme est hanté par le passé, par l’été 1986 en particulier, lorsque son amie Claudia a été sauvagement assassinée puis abandonnée au même endroit, dans les mêmes circonstances. Brisé et défiguré, ne tenant que par les doses de morphine qu’il ingurgite à longueur de journée, Valente reprend la traque du monstre qui a bouleversé son existence. L’Homme du Saule est de retour.
Été 1985, un jeune orphelin, Flavio, vient vivre chez son grand-père, un vieil ours solitaire. En compagnie de Stefano, Damanio et Claudia, il découvre l’insouciance, l’amitié, l’amour… Après les mois passés à s’occuper de sa mère mourante, il reprend goût à la vie. Mais la tragédie se rappellera à son bon souvenir.
L’intrigue du roman est très classique, un meurtre dans le passé, un autre dans le présent, forcément liés ; la forme, avec l’alternance des chapitres hier/aujourd’hui l’est tout autant, même si Antonio Lanzetta surprend en choisissant un narrateur différent pour ces deux époques. Les personnages de nos jours sont des archétypes du genre sans grande originalité, à l’exception sans doute du traitement de Valente, qui finit par exercer une sorte de fascination sur le lecteur, à force de souffrances. Toutefois, on accroche avec l’ensemble, grâce à une plongée très réussie dans l’Italie profonde, ce village où querelles de famille, vieux contentieux et fond de mafia forment un terreau sensible et touchant. Les adolescents de 1985 sont travaillés et sonnent très juste. Amitié, amour, rivalité rythment cet été-là, marquant à jamais ces jeunes. Les personnages ont cette profondeur qui retient le lecteur. L’auteur est semble-t-il plus à l’aise avec ces jeunes gens qu’avec les adultes qu’ils sont devenus, qui paraissent presque lisses. Une déception aussi quant au « méchant » : on ne saura pas grand-chose de ses motivations, de ce qui a réellement fait de lui ce qu’il est, ou de comment il l’a découvert et assumé.
Le roman tient par son ambiance parfois sombre, parfois lumineuse, par le sentiment d’inéluctabilité du sort qui guette ses héros, par sa description de l’Italie rurale, par ses personnages d’adolescents surtout, très réussis.
Pas incontournable, mais honorable, "Le mal en soi" se lit agréablement et laisse augurer des qualités chez l’auteur qui ne demandent qu’à s’épanouir dans un prochain ouvrage.
Le mal en soi
Auteur : Antonio Lanzetta
Éditeur : Bragelonne
Collection : Thriller
Parution : 14 mars 2018
Prix : 20 €