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La Fresque : un rêve chorégraphique en clair-obscur de toute beauté

  • Écrit par : Julie Cadilhac

FresquePar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.com/ Pour sa création « La fresque Â», Angelin Preljocaj s’est inspiré d’un conte chinois intitulé « La peinture sur le mur Â». Il y est question de deux jeunes voyageurs fatigués que le mauvais temps surprend sur la route et qui décident de s’abriter dans un temple désert. Là ils découvrent une fresque fascinante dans laquelle une jeune femme pensive, aux cheveux de jais et à la bouche cerise, est entourée d’autres jeunes filles tout aussi ensorcelantes. L’image s’anime soudain, phénomène magique déclenché par la passion soudaine de l’un d’eux; ce derniere traverse le mur, la rejoint et vit à ses côtés une aventure fantastique.

Accompagné des lumières sculpturales d’Eric Soyer, des costumes à l’esthétique et l’adaptation aux mouvements fabuleuses du couturier Azzedine Alaïa et de la musique envoûtante de Nicolas Odin, le chorégraphe français narre ce conte merveilleux, baigné d’étrangeté et d’illusions, avec un immense talent. On se souvient ainsi d’un tableau ébouriffant de jeunes femmes médusantes où les jupons et les cheveux s’envolent et tourbillonnent à l'envi. Nymphes baignées de blancheur lunaire et d’obscurité lascive, elles se métamorphosent en sirènes tentatrices et le sol miroite avec la noirceur du Styx. Emporté par la vague, le regard découvre ensuite en clair-obscur un superbe duo amoureux où la verticalité des amants répond à l’horizontalité des jeunes femmes dansant dans ce monde impalpable.

A l’ouverture, des aurores boréales accompagnent des filaments de lumières qui résonnent en matrices mystérieuses. Rhizomes de fibres lumineuses qui battent comme un coeur immatériel au dessus de cette envolée lyrique aux pas dansés.

L’art d’Angelin Preljocaj est aussi dans sa capacité à varier les registres et les rythmes, ôtant toute possibilité de lassitude au spectateur. Après les effusions amoureuses des débuts, s’invitent sur le plateau des airs folkloriques aux tonalités rock étonnantes d’une tonicité épatante. Energie jubilatoire aux mouvements balanciers entraînants. Puis y succède un duo en ombres chinoises et femmes aux bras ondulants… Si lègères sous le ciel étoilé. Songe d’une nuit d’été.

Minutes en suspension, hors du temps où la musique accompagne des songes phototaxiques, imaginés par la designer Constance Guisset. Tout flotte et l’on s’accroche à une remarquable danseuse, volute blanche d’une gracilité méritoire.

Cette « Fresque Â» pourrait être née des Songes et Métamorphoses d’Ovide, tant elle est peuplée de créatures fascinantes qui semblent d’ailleurs emprunter à diverses sources d’inspiration, de la mythologie grecque aux figures de l’Orient…Certains masques rappelent même Hayao Miyazaki et son voyage de Chihiro. On assiste, un instant, à la danse sautillante et endiablée d’un sorcier…et la musique, qui se permet toutes les excentricités, n'hésite pas alors à disserter en notes électroniques. 

Magie ensuite d’une toile enthousiasmante de créativité où quatre Grâces jouent avec les mèches de cheveux de la jeune femme aux cheveux de jais. La chevelure libre et sauvage de l’amoureuse devient peu à peu le chignon soigné et sage de l’épouse. Occasion exquise d'inventer des jeux dansants où l'enfantin côtoie la féminité, la douceur se mêle à la contrainte. Puis vient l’acmé, peut-être, de cet incroyable songe… Apparaissent des divinités aux chevelures qui montent jusqu’au ciel. L’occasion d’un ballet acrobatique où des Calypso aux yeux perçants bercent dans leurs cheveux leurs compagnons de danse. Grimper dans la chevelure de celle que l’on désire, s’emmêler dans ses mèches rebelles…un rêve hallucinant de femmes chrysalides que l’on n’est pas prêt d’oublier.

Une fenêtre de lumière. Des figures à bras aux circonvolutions chamaniques. Un bouquet de roses et des amants séparés. Fin du songe. Pour le jeune homme. Pour le public…qui repart l’esprit enchanté de cette fantaisie dansée qui a la texture des rêves, la mélancolie des amours impossibles et la fragilité des émotions artistiques…écarlates et fugaces.

La Fresque
Ballet Preljocaj
Pièce pour 10 danseurs
Chorégraphie : Angelin Preljocaj
Musique : Nicolas Godin avec la collaboration de Vincent Taurelle sur certains morceaux
Costumes : Azzedine Alaïa
Décors et vidéos : Constance Guisset Studio
Lumières : Éric Soyer
Assistant adjoint à la direction artistique : Youri Aharon Van den Bosch
Assistante répétitrice : Cécile Médour
Choréologue : Dany Lévêque
Réalisation masques : Michèle Belobradic
Réalisation décors : Atelier du petit chantier
Production : Ballet Preljocaj
Coproduction : Grand Théâtre de Provence, Maison des Arts de Créteil, Théâtre de la Ville - Paris / Chaillot - théâtre national de la danse, Scène Nationale d’Albi, National Taichung Theater (Taïwan)

Dates et lieux des représentations:

- Les 19 et 20 février 2019 au à L’Opéra Berlioz - Le Corum- Montpellier dans le cadre de la programmation de Montpellier Danse

- Le vendredi 15 mars 2019 - 20h30 à Noisy-le-Grand Espace Michel Simon - www.espacemichelsimon.fr
— Les 26 et 27 mars 19h30 à Ann Arbor (États-Unis) - Power Center, UMS - www.ums.org
- Le 30 mars 2019 à 19h30 à Minneapolis (États-Unis) - Northrope University- www.northrop.umn.edu
- Les 4, 5, 6 avril 2019 à 20h à Seattle (États-Unis) - Meany Hall for the Performing Arts - www.meanycenter.org
- Le 10 avril 2019 à 19h à Davis (États-Unis)- Mondavi Center - www.mondaviarts.org
- Le 16 avril 2019 à 20h à Santa Barbara (États-Unis)- UCSB Arts and Lecture- www.artsandlectures.ucsb.edu
- Le 18 avril 2019 à 20h à Northridge (États-Unis) Younes and Soraya Nazarian Center for the Performing Arts (The Soraya)- www.thesoraya.org
- Le 28 mai 2019 à 20h à Vannes - Théâtre Anne de Bretagne - www.scenesdugolfe.com
- Les 5, 6, 7 juin 2019 à 20h30 à Blagnac - Odyssud - www.odyssud.com
- Les 19 et 20 juin 2019 à Perpignan L'Archipel, Scène Nationale de Perpignan www.theatredelarchipel.org

Le site du chorégraphe 

La fresque


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