Certes » par la compagnie l'Enjoliveur : un spectacle vivant et décalé
- Écrit par : Virginie Gossart
Par Virginie Gossart - Lagrandeparade.fr/ Dès que l'on pénètre sous le petit chapiteau de la compagnie l'Enjoliveur, on est accueilli par deux énergumènes en costumes et chapeaux, dont les trognes incroyables et les fines moustaches bien taillées ne dépareilleraient pas dans un film de Kusturica, et dont on ne sait pas encore qu'ils seront les deux principaux acteurs de ce spectacle haut en couleur.
Ce que l'on ignore également, c'est que la représentation a déjà commencé lorsque les deux comparses préviennent le public – les enfants en particulier – de bien libérer les escaliers et de ne surtout pas se déplacer pendant les numéros s'ils veulent rester vivants jusqu'au bout et ne pas risquer de prendre un mauvais coup. Après avoir assisté au spectacle, on comprend rétrospectivement que la mise en garde n'était pas seulement un trait d'humour. Car les virevoltantes et dangereuses prouesses des trois acrobates qui nous amusent, nous effraient, nous émeuvent, nous impressionnent et nous transportent pendant plus d'une heure trente n'ont rien d'une promenade de santé ! Dès les premières minutes, l'expérience et la cohésion des deux clowns-cascadeurs, de la belle funambule, et des deux musiciens qui les accompagnent, ne fait pas l'ombre d'un doute. Alternant dans un rythme effréné mises en scènes burlesques à la Buster Keaton, séances de magie tour à tour ridicules ou étonnantes, prouesses techniques (les sauts et portés sont à couper le souffle) et moments de grâce poétique, Olivier Grandperrin, Daniel Pean (dit « Pépé »), et Anaïck Van Glabeke ne nous laissent pas une minute de répit, nous faisant oublier la chaleur régnant sous le chapiteau. On nous raconte ici la légende du cirque, les clichés qui lui collent parfois à la peau, les histoires d'amitié et d'amour qui s'y nouent, l'importance du groupe pour se relever des faux pas de « nos vies en chantier ». On se querelle aussi et cela finit parfois dans un rocambolesque duel à l'épée où l'on déclame du Cyrano et où le public lui-même craint pour sa vie. Le grand baraqué à gueule d'ange est amoureux de la gracieuse équilibriste, mais il se fait souvent voler la vedette par le petit clown déchaîné et hâbleur, compagnon sur la scène mais concurrent en amour. Quant aux deux musiciens (Erik Jankowsky et Livi), ils ne se contentent pas d'habiller les numéros qui se succèdent et participent eux-aussi activement au spectacle. Ne ratez surtout pas la séance de trampoline, où l'on est tantôt plié en quatre de rire, tantôt médusé par la maîtrise technique de chacun. La référence finale à Molière ne nous apparaît donc pas comme un pur ornement, tant la vie et la scène semblent inextricablement mêlées pour ces cinq artistes aux multiples talents. La compagnie l'Enjoliveur réussit avec brio à proposer un divertissement résolument moderne tout en nous rappelant la féérie des spectacles de cirque qui nous ont marqués dans notre enfance. Elle fait ainsi, avec beaucoup d'humilité, d'humour et d'humanité, le lien entre cirque traditionnel et nouveau cirque.
Certes
Compagnie L'enjoliveur
Avec Olivier Grandperrin, Daniel Péan, Anaïck Van Glabeke
Musiciens : Erik Jankowski et Livi
Régie : Nickolson
Durée : 1h30
Dès 3 ans
- Du 11 au 16 juillet 2017 au Festival d'Alba-la-Romaine ( Ardèche)