Fabrini Crisci : les toiles spectaculaires d'un magicien brésilien
- Écrit par : Julie Cadilhac
Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Tout commence à Sao Paulo, au Brésil, en décembre 1964. Nait un petit garçon espiègle qui, en grandissant, est très vite attiré par la magie. A 15 ans, dans un magasin de farces et attrapes, tout se déclenche dans sa tête et il s'essaie d'abord au "Close-up" puis à la manipulation des cartes. Il gagne plusieurs prix avec cette spécialité et finit par pratiquer la " magie générale". Ensuite? Il voyage dans le monde entier, écumant les cabarets tels que Le Crazy Horse, le Wintergarten, le Casino de Monte Carlo ou encore le MGM de Las Vegas. A 34 ans, il commence à esquisser des caricatures d'artistes avec lesquels il partage la scène. On prend l'habitude à la fin de son show de lui demander un portrait. Très vite, il se met à ne dessiner que des magiciens. En 2006, il expose ses peintures à Monte Carlo et l'une de ses toiles est remarquée par le Prince Albert qui choisit de l'utiliser pour créer un timbre commémoratif de Monaco. Après avoir vécu plusieurs années en Allemagne, l'artiste vit aujourd'hui au Brésil mais continue à se déplacer partout où la magie l'appelle.
Bienvenue dans l'univers de ce peintre magicien talentueux, d'une grande bonhommie et qui partage sa passion avec une générosité enthousiasmante!
A 15 ans, vous êtes entré dans un magasin de trucs et astuces et vous avez eu envie de devenir magicien...de quelles qualités doit faire preuve un magicien selon vous?
Pendant toutes les années de cette belle carrière, j'ai connu beaucoup de magiciens : ceux qui m'ont le plus impressionné ne sont pas ceux qui avaient une grande technique ni ceux qui faisaient de grandes performances mais c'étaient plutôt ceux qui croyaient vraiment en leurs pouvoirs. Beaucoup d'acteurs, qui ont eu un rôle de magicien au cinéma, sont plus crédibles qu'un magicien professionnel. Je pense qu'il faut d'abord apprendre à être en représentation et savoir être éloquent devant un public, et ensuite bien étudier tous les tours de magie, pour seulement après aller sur scène et enfin devenir magicien.
Avez-vous travaillé au sein d'une troupe de cirque traditionnel? Avez-vous fait des tournées avec caravane et chapiteau? Est-ce là que vous aimez par dessus tout faire votre métier de magicien?
Oui, j'ai eu la chance de travailler pendant deux ans dans le plus beau cirque au monde, chez Roncalli en Allemagne. Même si mon numéro n'était pas vraiment adapté pour les chapiteaux, puisque je devais être vu de face et pas de côté, on a eu pas mal de succès, nous étions très bien reçus par le public, cela restera toujours une superbe expérience. Nous faisions six villes dans l'année et j'ai rencontré de nombreuses personnes qui resteront pour toujours gravées dans ma mémoire.
Quel est votre meilleur tour?
Et bien, en effet, j'en connais quelques uns, mais celui que je préfère, c'est de faire disparaître une bonne bouteille une fois par semaine..!
Qu'est-ce qui vous a donné envie de représenter votre univers au travers de la peinture? C'est à Paris, je crois, qu'est né le désir de peindre, non?
Et oui, c'est bien à Paris que mon désir de peindre est né, et surtout de représenter l'univers du show biz, de la magie en particulier, puisque c'était aussi l'univers dans lequel j'évoluais. J'ai commencé par dessiner des caricatures, puis j'ai eu un livre publié, Magicartoon, et puis je me suis carrément mis à peindre sur toile, le chemin s'est fait tout naturellement.
Si l'on vous demandait cinq mots en vrac pour définir le cirque, lesquels vous viendraient immédiatement à l'esprit?
Discipline , famille, travail, voyage ,amitié.
Vous avez pu dire, il y a presque six ans, que le personnage de cirque dont vous vous sentiez le plus proche, c'était le clown blanc...est-ce toujours le cas aujourd'hui? Et si oui, pourquoi?
Dès mon premier instant au cirque, c'est le clown blanc qui est venu me dire bonjour, nous sommes donc devenus amis et ça a duré jusqu'à aujourd'hui; je crois que j'ai un caractère facile, et beaucoup d'autres amis, depuis, se sont rajoutés.
Y-a-t-il un cirque célèbre internationalement et/ou nationalement dont vous aimez particulièrement l'univers? Fréquentez-vous beaucoup les chapiteaux en tant que spectateur?
Je n'aime pas trop les grandes productions artistiques, je crois que le cirque doit rester un spectacle fait de façon artisanale, c'est comme un bouquet de fleurs, on ne peut pas les cacher derrière un grand paquet avec des lacets, la beauté des fleurs doit rester intacte. Pour moi, le Cirque Roncalli reste dans la tradition et c'est ça que j'aime, bien sûr que j'admire aussi le nouveau cirque et je pourrais citer: le Cirque Eloize, le Cirque Plume ou encore le Cirque Cirkor.
Tim Burton est l'un de vos mentors...il y a un peu du " L'étrange Noël de Mister Jack" dans les silhouettes de certains de vos personnages... On se trompe?
Tim Burton a créé un style unique en son genre, avec ses personnages bizarres et doux à la fois; beaucoup d'artistes ont été influencés par ce style, moi aussi.
Avec quelles matières, quels outils et sur quels supports travaillez-vous?
Il faut dire que j'ai fait le chemin à l'envers, c'est à dire que, au début, j'ai commencé par faire des dessins numériques, il y avait des logiciels pour cela, qui ne marchaient pas très bien d'ailleurs; peu de temps après, je suis passé à la toile. A cause d'une allergie très sévère, j'ai du abandonner l'huile et travailler plutôt avec l'acrylique, avec laquelle je me suis tout de suite adapté, surtout pour le séchage, vu qu'à l'époque je me déplaçais beaucoup... mais je dois dire qu'aujourd'hui je reviens à l'huile de temps en temps et le résultat est tout à fait autre.
Combien de temps en moyenne pour réaliser un tableau?
Si je travaille à l'acrylique c'est très rapide, ça prend entre 4 à 7 jours, ça dépend aussi de la taille de la toile, mais en général c'est ça; à l'huile, c'est autre chose puisque je dois m'arrêter pour attendre que ça sèche et recommencer quelques jours après.
Quelle est la “ recette” magique d'une bonne toile pour Fabrini Crisci? Une pincée de couleurs vives, un soupçon de mise en scène et un grain de folie?
Je ne me prends pas la tête avec des techniques très complexes pour parvenir à la perfection, ce n'est pas mon style, je suis plutôt attiré par les traits imparfaits, les effets de la peinture qui coule; à mon avis, c'est ça qui donne un sens à mon travail. Le plus important pour moi, c'est de transmettre sur la toile ce que j'ai dans la tête, et tout de suite, avant que l'idée ne disparaisse pour devenir autre chose.
Vos personnages n'ont souvent pas de visage ou disposent d'une tête pour le moins étrange....parce qu'ils sont le reflet de vos rêves ou de vos cauchemars?
Pour moi, l'expression du visage ne veut pas dire grand chose; au cirque comme au théâtre, c'est à travers l'expression du corps qu'on passe toutes les informations. Avec le temps, j'ai ressenti une profonde difficulté à donner une expression à un personnage, j'ai senti aussi que ce n'étaient pas les yeux qui donnent les informations mais la bouche, tout peut changer à partir de là, et j'ai décidé de laisser la liberté d'imaginer au public.
Cartes à jouer, hauts de forme, queues de pie, rayures, les thèmes récurrents ne manquent pas...est-ce justement ce qui vous amuse? de reprendre toujours les mêmes éléments et d'essayer de trouver de nouvelles façons originales de les présenter? ....un peu comme fait le magicien pour inventer de nouveaux tours?
En musique, il suffit de quelques notes et les possibilités sont infinies, pour la magie c'est pareil, nous avons nos utiles comme les cartes à jouer, les dès, des boites magiques, etc, avec ça, on peut créer sans arrêt. Il y a beaucoup d'éléments qui font partie de ma vie de magicien qui sont très intéressants au niveau du graphisme, pour cette raison je les insère dans mes toiles.
Comment se nomme votre dernier tableau? Pourriez-vous nous en parler?
Ma dernière toile n'est pas encore finie, j'ai déjà son nom, puisque c'était justement ce qui m'a inspiré, le titre est un peu long c'est sûr, mais bon...je vous le donne:
"Memories, pressed between the pages of my mind,
Memories, sweetened thru the ages just like wine."
Enfin, vivez-vous toujours à Berlin? Où pourrait-on avoir la chance de croiser l'un de vos shows ou l'un de vos tableaux?
Actuellement je vis au Brésil mais je me déplace toujours puisque je continue ma vie d'artiste sur scène; cette année, je suis allé à Istanbul, Varsovie, Dubaï, et il me reste encore à visiter Shanghaï et Berlin.
Le site de Fabrini Crisci : http://www.fabriniart.com/
Le théâtre Colombino à Freiburg (Allemagne) a été entièrement décoré avec des illustrations de Fabrini Crisci.
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