Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ Yhué, atteinte d’une maladie dégénérative incurable, pousse celui qu’elle aime, Sohann, à s’engager dans l’armée pour aller combattre une espèce inconnue, les Nostrems, qui a déjà exterminé des milliards d’humains sur les planètes qu’ils ont colonisées et semblent bien décidés à éradiquer ceux qui restent.

Lors d’une attaque, Sohann est tué, tandis que Yhué est recueillie à bord de l’Arche, un gigantesque vaisseau spatial dirigé par Mère, qui s’est donné pour mission de sauver le plus d’humains possible. Nul ne sait vraiment qui est Mère, ni quels sont ces véritables desseins. Elle commande l’Arche d’une main de fer, adorée comme un gourou. Personne n’a jamais vu les Nostrems, ni ne comprend leurs motivations.

Sur la planète Selgat, les Caudales ont prévenu : « l’espèce qui vient sera sans pitié ». Borée, une historienne va tenter d’approcher les Nostrems. Contrairement à beaucoup des siens, elle s’intéresse aux populations non-humaines, les considère et se désespère de l’attitude violente et conquérante de son peuple. En compagnie de quelques non-humains, elle forme un équipage hétéroclite pour une mission de la dernière chance...

L’Arche de Mère est un space opera au background impressionnant ; espèces sentientes étranges, organisation sociale et politique très travaillée, alternance de moments du quotidien et d’aventures mouvementées, l’univers est très soigné. Les thématiques abordées sont profondes et très actuelles : les questionnements autour de la colonisation, la place de l’humanité sur Terre et dans la galaxie, le transhumanisme, la valeur (ou non) de l’humain en général, mais aussi en particulier, la force des liens de fraternité, d’amitié, d’amour. Ces liens guident les actes des personnages, les confrontent à des épreuves qui les font grandir et évoluer.

Pierre Bordage sait soigner un scénario et nous réserve un rebondissement remarquable, par son intelligence et sa portée. On pourra seulement regretter que les protagonistes non-humains voient leur rôle diminuer au fil de la narration, on aurait apprécié les connaître encore mieux. Bien que le récit soit une dénonciation franche de la violence et de la cupidité de l’humanité, ce sont quand même les humains qui sont au premier plan. Pour autant, cela reste un roman qui se dévore, qui pousse à réfléchir, qui procure des émotions, qui sait nous offrir des personnages attachants, pétris de contradictions, qui évoluent au gré de leurs aventures. Borée, en particulier, possède une finesse, une intelligence et une sensibilité remarquable.

L’arche de Mère 
Auteur : Pierre Bordage
Éditions : Scrineo
Collection : SF
Parution : 25 septembre 2025
Prix : 22 €
À partir de 15 ans