Une ombre au tableau : un « long dérapage sur les bandes blanches du quotidien »
- Écrit par : Julie Cadilhac
Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Lorsque Stéphane Ogier offre à son ami - et conseiller bancaire - Greg Delgado l’opportunité d’acheter à un prix défiant toute concurrence la maison - luxueuse - de ses rêves, ce dernier omet d’expliquer à son épouse Mélissa la véritable raison d’une telle « affaire ». Quelques semaines plus tôt, en effet, un petit garçon, dont l’âge effleure de près celui du couple acheteur, s’y est noyé dans la piscine. Mélissa, au sixième sens affuté, sent pourtant dès sa première visite de la villa un malaise qu’elle ne saurait effacer d’un revers de la pensée. Pourquoi n’insiste-t-elle pas alors? Aurait-elle elle aussi quelque chose à cacher?
Myriam Chirousse nous entraîne dans un roman attirant où la chaleur caniculaire de la Côte d’Azur anesthésie les esprits et se veut la raison suffisante à se laisser aller au plaisir pour éviter de se confronter à la réalité, forcément plus incisive et dérangeante. La plume fluide de l’auteure, sa poésie délicieuse intrinsèque - chaque phrase étant ciselée avec un vrai talent d’orfèvre - font de cette lecture un moment délicieux. Très vite Mélissa semble familière ; Myriam Chirousse dépeint avec beaucoup de justesse cette jeune femme téméraire et baroudeuse d’alors qui a endossé le statut d'épouse bourgeoise avec autant d’appréhension et de regrets que de compromission lucide. Son choix d’utiliser différentes focalisations dans le roman s’avère pertinent du fait de sa nature « policière » et laisse du suspense au lecteur.
Une parenthèse en Provence d'une délicatesse et d'une subtilité tout féminines!
[bt_quote style="default" width="0"]Une obscurité nacrée baignait le parc, lui conférant un aspect inquiétant et mystérieux, plus authentique aussi, comme si la nuit avait le pouvoir de révéler le vrai visage des choses. La pelouse avait le bleu foncé des mers australes et tout le reste était noir, les grands pins, les bosquets, les haies. Noir aussi le prunier en fleurs du printemps, dont tous les fruits avaient été mangés par les oiseaux et les vers. Seule la margelle de la piscine traçait dans l’ombre un ovale lactescent, au milieu duquel l’eau étalait son vif-argent.[/bt_quote]
Une ombre au tableau
Editions : Buchet Chastel
Auteure : Myriam Chirousse
Parution : 5 avril 2018
Prix : 17€
« -Ils sont beaux, nos hommes, tu ne trouves pas? Dans des styles différents mais complémentaires.
Il se dégageait de la voix de Diane une onctuosité troublante. Elle marqua une pause avant de poursuivre. »
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