Le poids des fourmis : une fable éco-anxieuse au cynisme corrosif
- Écrit par : Xavier Paquet
Par Xavier Paquet - Lagrandeparade.com/ Musique d’ambiance, palmier éclairé et chemises hawaïennes, espace central au look blanc d’un spa entouré d’une piscine de boules grises. Ilot de fraicheur vanté dans la dernière pub de vacances ? Vestige d’un espace préservé et menacé de pollution ? Espoir d’un nouveau monde en train d’éclore ?
Et si finalement, la symbolique ne portait pas sur toutes ces possibilités dans cette création originale où l’atypisme du décor reflète pourtant une école, espace vital minimaliste, qui fait écho à l’espace terrestre mondial.
Jeanne et Olivier y sont deux élèves adolescents qui veulent faire changer les choses face au dérèglement climatique et aux menaces environnementales. La Direction de l’établissement, cynique et conformiste dans son confort de vie où rien ne doit changer et dans sa vision autocentrée du monde, leur propose de participer à l’élection de la présidence du comité étudiant pour faire valoir leurs idées et revendications.
Tous les deux ont des caractères et personnalités opposés : Jeanne est révoltée, appelle à la désobéissance et se complet dans l’action en taguant les affiches de pub ; Olivier s’émerveille de la beauté du monde, croit en la bonté de l’Homme et que les mots peuvent corriger les maux. Elle réfute la société de consommation et préfère la vandaliser plutôt que de s’y soumettre ; il emprunte en librairie une encyclopédie du savoir inutile qui deviendra sa bible romantique du monde.
Satirique, la pièce met en exergue la violence d’un monde désenchanté et le combat de la jeunesse mais elle le fait avec une puissance comique et un cynisme corrosif : comique de situation, comique de texte et comique de comportement. Tous les curseurs sont poussés pour embarquer le spectateur dans cette fable éco anxieuse aux allures de conte des temps modernes. La mise en scène renforce l’absurdité de certaines situations par ce décor de carte postale et des personnages aux tempéraments bien trempés : l’énergie et la vitalité de la jeunesse face à l’immobilisme et à l’attentisme de la Direction. En toile de fond, la radicalité nécessaire en réponse à l’indifférence.
Jeanne et Olivier se retrouvent à combattre un système de l’intérieur et à en découvrir la cupidité, la manipulation avec des dés pipés et des jeux faits d’avance. Un rapport de force déséquilibré où l’entraide et la force de la jeunesse peuvent faire bouger les choses.
Derrière le vernis caustique où l’humour fait passer le message avec douceur et incite à la réflexion, « le poids des fourmis » prend l’école comme prétexte d’un système plus global qu’il est compliqué de changer : et si rien ne change dès l’école, chantre du futur, qu’en est-il du reste du monde ?
L’ensemble des fourmis du monde entier pèse plus lourd que l’ensemble des êtres humains de la planète : le plus petit peut avoir un poids supérieur au plus grand. Derrière cette métaphore, un message universel : les fourmis sont la société la plus aboutie car celle où l’on s’entraide, où chacun apporte sa pierre à l’édifice collectif, où le Nous surpasse le Je.
« Croire que je peux changer le monde me donne envie d’en faire partie. »
Le poids des fourmis
De David Paquet
Chargé·e de diffusion : Séverine André Liebaut
Assistant·e de mise en scène : Vanessa Beaupré
Directeur·rice artistique : Mario Borges, Joachim Tanguay
Régie générale : Antoine Breton
Directeur·rice technique : Rébecca Brouillard
Comédien·ne : Nathalie Claude, Gaétan Nadeau, Élisabeth Smith, Gabriel Szabo
Metteur·se en scène : Philippe Cyr
Création lumière : Cédric Delorme-Bouchard
Scénographe : Odile Gamache
Créateur·rice son : Christophe Lamarche-Ledoux
Attaché·e presse : Alexis Louet
Chargé·e de développement : Sylvie Pouliot
Costumes : Étienne René-Contant
bluff productions inc.
Dates et lieux des représentations:
- Juillet 2024 à la Manufacture - Festival Avignon OFF 2024