Campana : sous le beffroi, les tintements circassiens de Bonaventure et Titoune aux alliages steampunk fantastiques
- Écrit par : Julie Cadilhac
Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.com/ Dans leur chapiteau qui fleure bon le cirque d’antan, le cirque Trottola a perché deux musiciens sur une minuscule scène sur laquelle reposent divers instruments hybrides qui semblent sortir tout droit de l’imagination d’un savant mélomane.
Ambiance sonore post-apocalyptique. Le tapis qui recouvrait la piste est soudain dévoré par une machinerie-Charybde; puis surgit des entrailles de la terre une échelle d’où s’extirpent deux personnages aussi fascinants que déboussolés, un duo à la Laurel et Hardy désopilant. Un grand gaillard rouquin charismatique, aux grands yeux bleus écarquillés et au long manteau et son acolyte aux airs de lutin gaffeur exécutent des figures acrobatiques aussi épatantes que singulières, s’amusent à surprendre les spectateurs en multipliant les manières d’apparaître, s’avèrent intrinsèquement clowns…et invitent le spectateur avec autant de maladresse que de sincérité à se poser des questions existentielles. Invitation poétique et foulosophique à aimer la vie, à profiter de ce temps qui reste dont nous ne connaissons pas la durée. Complainte mélancolique aussi vis à vis de cette existence joueuse dont nous ne maîtrisons pas les fils, qui se marie intelligemment avec les visages fardés de blanc.
Il y a du Charlie Chaplin dans le travail du cirque Trottola qui a bien saisi que le rire est une chose fragile et qui éclot dans la perspective d’une abysse qu’on évite toujours de peu. Ainsi cette échelle qu’on ne maîtrise pas bien et qui menace avec une vitesse prodigieuse comme une épée de Damoclès. On y trouve aussi l’influence de la Commedia dell’arte et ses grommelots, du cirque traditionnel avec l’Auguste et le clown blanc ( Prenons ici l’occasion de louer les costumes superbes de ce spectacle qui ceignent à la perfection les artistes, les baignent d’un bleu nuit saisissant, les strient de carreaux ou de rayures avec autant d’espièglerie que d’esthétique et ne parlons pas d’un costume de contre-pitre stroboscopique qui brille de mille éclats!).
Campana vous fait rencontrer un singe trapéziste - ou serait-ce un chat?- un éléphant à l’extinction tout aussi poétique que symbolique et émouvante ( Assurément c’est le quadrupède pachyderme le plus doué jamais observé jusqu’alors!), un quatuor d’acrobaties virevoltant…et un clown qu’on avait déjà croisé dans le précédent spectacle « Matamore », tordant dans ses attitudes enfantines et ses circonvolutions à charrette.
[bt_quote style="default" width="0"]Mon pays, c’est la vie. Je l’aime tout le temps qui reste.[/bt_quote]
"Campana" du Cirque Trottola? Une esthétique steampunk attrayante, évoquant les années 1900 et la Belle-Epoque dominés par la première révolution industrielle du charbon et de la vapeur. Deux performeurs au jeu aussi percutant que leurs prouesses gymnastiques, une bande-sonore musicale de qualité, une machinerie à la mécanique prodigieusement millimétrée et huilée…Un show circassien qui extirpe sa substantifique moëlle des entrailles de la terre et l'a fait danser sous les étoiles du chapiteau ; un moment en suspension où l'on ne distingue plus la nuit du jour, l’envers de l’endroit, le haut du bas, l'universel du singulier… Magie de ces trappes d’où surgissent les protagonistes sortant de profondeurs grondantes, monde caché que l’on imagine baigné de volutes de fumée, envahi d’un réseau inextricable de tuyaux, de cordes et de poteaux…jusqu’au tocsin final où le Capitaine de cette fantaisie circassienne, tout droit sorti d’une fiction de Jules Verne, à cheval sur une cloche géante puis la faisant chanter à la volée, annonce peut-être le naufrage dans lequel le Monde se précipite si, au lieu de prendre le temps de se poser et de savourer le temps qui reste, il ne cesse de lui courir après et d’en faire une monnaie d’échange. Si, en effet, la technologie moderne donne aux hommes un sentiment d’omnipotence, le tintement d’une cloche lui rappelle toujours qu’il ne sera jamais maitre du temps. Profitez-en donc dès maintenant et commencez par partager du temps avec ceux que vous aimez devant ce bel objet de cirque! "Voilà voilà voilà"...
[bt_quote style="default" width="0"]Je veux jouer encore. [/bt_quote]
Campana
Conception : artistes du Cirque Trottola
En piste : Titoune & Bonaventure Gacon
Aux instruments : Thomas Barrière & Bastien Pelenc
Régie lumière et son : Joachim Gacon-Douard
Fille de piste : Jeanne Maigne
Costumes : Anne Jonathan
Equipage chapiteau : Sara Giommetti & Florence Lebeau
Conseillers techniques, artistiques et acrobatiques : Jérémy Anne, Florian Bach, Filléas de Block, François Cervantes, Grégory Cosenza, François Derobert, Pierre Le Gouallec & Nicolas Picot
Constructions : Scola Teloni, CEN.Construction, Atelier Vindiak & Lali Maille
Fondeur : Paul Bergamo – Fonderie Cornille-Havard
Visuels : Paille (décors cloche), Nathalie Novi (peinture affiche), Philippe Laurençon (photos)
Communication / Presse : Guiloui Karl
Production / Diffusion : Marc Délhiat
Production : La Toupie
Coproductions: Le Prato – Pôle National des Arts du Cirque à Lille
Furies – Pôle National Cirque et Arts de la Rue à Châlons-en-Champagne
Les 2 Scènes – Scène Nationale de Besançon
2 Pôles Cirque en Normandie/La Brèche Cherbourg – Cirque-Théâtre d’Elbeuf
Cirque Jules Verne – Pôle National Cirque et Arts de la Rue d’Amiens
L’Agora – Pôle National des Arts du Cirque de Boulazac Nouvelle Aquitaine
Théâtre Firmin Gémier/La Piscine – Pôle National Cirque d’Ile-de-France
Le Carré Magique Lannion Trégor – Pôle National Cirque en Bretagne
La Cascade – Pôle National Cirque Bourg-St-Andéol
Dates et lieux des représentations:
- 19, 20, 22 et 23 février - Sète (34) - Théâtre Molière – Scène Nationale Archipel de Thau - www.scenenationale-sete-bassindethau.com
- 9, 10, 12 et 13 mars - Elbeuf (76)- Festival Spring - Cirque Théâtre d’Elbeuf – Pôle National Cirque - Cirque-Théâtre Elbeuf
- 23, 24, 26 et 27 mars - Villedieu-les-Poêles (50) - Villedieu-Intercom, Théâtre de Coutances, Villes en Scène et Festival Spring
- 3, 4, 6, 7, 10, 11, 13 et 14 mai - Le Mans (72) - Les Quinconces – L’Espal – Scène Nationale - Les Quinconces-L’espal
- 28, 29, 31 mai et 1er juin - Canet (34) - Le Sillon - http://www.theatre-lesillon.fr
- 11, 12, 14, 15, 18, 19, 21, 22, 25 et 26 Juin - Prague (République Tchèque) - Festival Arena - http://www.festivalarena.cz/about-the-festival/
- 9, 10, 12 et 13 juillet - Lausanne (Suisse) - Festival de La Cité Lausanne - http://festivalcite.ch/
Du cirque Trottola, on avait vu aussi :
Matamore : un acrobate mi-ogre mi-clown à rencontrer
Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.com/ Matamore est une récréation, colorée et euphorisante, inventée par le Cirque Trottola et le Petit Théâtre baraque. Ensemble, ils promènent les spectateurs - au coeur d'un chapiteau qui fleure bon l'authenticité et le goût de la tradition - dans un univers aussi cocasse que poétique. Tantôt clown ou contre-pitre, Nigloo, Titoune, Bonaventure, Branlotin et Mads exécutent acrobaties, jonglages, pitreries, dissertations musicales ou encore manipulations savantes de marionnettes selon les aptitudes de chacun et dans une bonne humeur communicative. On y découvre, en outre des voltiges aériennes impressionnantes de Titoune et Bonaventure Gacon, des numéros auxquels le public circassien est moins habitué et cette singularité est appréciable : dressage de chiens, lassos, jonglage de pistolets ou encore marionnettes gymnastes…Sur cette piste où les performances spectaculaires sont nombreuses, la troupe laisse cependant une part au sensible, ne cache pas les fragilités et s'expose avec beaucoup de générosité. On sort ainsi l'âme guillerette de ce spectacle - qui en est à plus de 250 représentations ! -, l'on applaudit encore en pensées l'incroyable Bonaventure Gacon, mi-clown mi-ogre Matamore désopilant , et ses compagnons de voyage et l'on n'hésitera pas une seconde,assurément, si leurs roulottes repassent, à franchir une nouvelle fois le seuil du chapiteau!
Matamore
Cirque Trottola et Petit Théâtre baraque
de et avec : Nigloo, Titoune, Bonaventure, Branlotin et Mads
Musique et son: Thomas Barrière, Alain Mahé, Bastien Pelenc
Costume: Anne Jonathan
Lumière et technique: Nicotin