La forme de l’eau : un conte fantastique d’une puissance émotionnelle remarquable
- Écrit par : Julie Cadilhac
Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Imaginez une jeune femme muette qui vit au dessus d’un théâtre à l’italienne reconverti en cinéma. Appelons-la Elisa, tiens. Son sexagénaire de voisin - Giles? - est un talentueux illustrateur récemment déchu de son emploi ( victime du progrès et de la mode naissante de la photographie), amoureux transi d’un playboy à la mentalité de cow-boy qui vend des tartes au citron vert insipide. Tous deux partagent des moments privilégiés en compagnie de comédies musicales où ils aiment à laisser leurs jambes virevolter allègrement en symbiose. Elisa travaille comme femme de ménage dans un laboratoire gouvernemental ultra-secret ; sa compagne de balais et de confidences, Zelda, a un mari au tempérament aussi amorphe et taiseux que le sien est bien trempé. Travaille aussi là -bas le Docteur Robert Hoffstetler, chercheur passionné, qui fricote d’un peu trop avec les Russes.
Un jour, Elisa et Zelda découvrent le gradé Strickland, odieux personnage à la violence revancharde, la main en sang…il semble avoir été attaqué par un étrange monstre marin qu’il garde mystérieusement enchaîné dans un bassin d’eau de mer salée…mais s’agit-il réellement d’un monstre dangereux? le mal a-t-il toujours le visage qu’on croit?
Choisissant d’introduire l'histoire par le biais de la voix-off du personnage de Giles, le film prend immédiatement des allures de conte à la lisière du fantastique et du merveilleux. Ajoutons-y un travail sur l'image magnifique, mêlant atmosphère désuète et nostalgique à une photographie de scènes urbaines piquées de touches de couleurs acidulées, une composition musicale délicate et poétique, une distribution impeccable ( Sally Hawkins est touchante de grâce, Richard Jenkins incarne un complice du quotidien attachant, Michael Stuhlbarg ravit dans son rôle de chercheur au grand coeur, Michael Shannon est glaçant à souhait…)et une bête amphibie fascinante dotée d’une sensibilité extrême. Autant d’ingrédients pour concocter une fiction enthousiasmante où le coeur explose sans cesse d’inquiétude vive, de fascination émerveillée, de palpitations amoureuses par procuration!
C’est toujours par le truchement des contes, finalement, que l’on évoque avec le plus de force toute la richesse qui naît de la différence. Et dans ce long-métrage, le réalisateur ne manque pas d’épingler toutes les discriminations humaines ( le handicap, la couleur de peau, le statut social, la différence physique, le statut matrimonial…) - mais sans avoir l’air de s’y attarder- pour nous prouver à quel point les plus belles histoires d'amitié et d'amour se nourrissent de la diversité, sont celles que l’on n’attend pas et qui ont à la fois la fluidité et le flouté des gouttes d’eau qui ridulent sur les vitres des fenêtres...
Un film MAGNIFIQUE, Ã voir incontestablement!
La forme de l’eau
Date de sortie : 21 février 2018
Durée : 2h 03min
Réalisateur : Guillermo del Toro
Avec Sally Hawkins, Michael Shannon, Richard Jenkins, Octavia Spencer, Michael Stuhlbarg, Doug Jones, David Hewlett, Nick Searcy…
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