Ramon Pipin : une jeune fille (pas vraiment) comme il faut
- Écrit par : Guillaume Chérel
Par Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ Dans sa préface au premier roman de son ami Alain Ranval, alias Ramon Pipin, « Une fille comme il faut », Tonino Benacquista écrit ceci : « Pipin a l’adjectif pendable, la parabole pétulante et la syntaxe sportive. » Exemple ? : « À cinq ans, il y a des mômes qui parlent couramment en hiéroglyphes, des qui bouffent des équations au p’tit déj, des qui jouent le Concerto pour piano no 1, de Rachmaninov, à l’harmonica… Et attends, on leur a mesuré le périmètre encéphalique, à tous ces petits génies, et figure-toi que vers treize ans ils font déjà cinq centimètres de plus que la moyenne nationale, t’imagines ? Si ça continue, on va avoir une génération de mômes avec des crânes d’un mètre cinquante de diamètre. C’est les fabricants de passe-montagnes qui vont être contents !… ». Il est vrai que ça rappelle un peu les vieux de la vieille comme Alphonse Boudard, Audiard, San Antonio. Ça sent le poulbot parigot.
Pour la petite histoire, et pour ceux qui ne connaissent pas le bougre, dans sa « jeunesse », Ramon Pipin (Alain Ranval, donc) titillait le sommet des « charts » au sein du groupe « Au Bonheur des Dames », avec le tube « Oh les filles ! » : ça nous rajeunit pas… Puis il a formé le groupe « Odeurs », devenu mythique par son alliance entre humour décapant, spectacles hauts en couleurs et musique de qualité. Il remonte sur scène régulièrement, malgré son âge canonique… (tout ça pour dire que c’est un rockeur à l’ancienne, pas le genre à cirer les pompes des « majors »). Parallèlement, il a réalisé plusieurs albums pour Renaud, et a composé pour le théâtre et pour l’image : publicité, séries d’animation et films, entre autres avec Albert Dupontel, Laurent Baffie, Patrice Leconte, Antoine de Caunes… Faisant mine de nous embarquer dans un polar, « Une jeune fille comme il faut » plonge, sur un ton de comédie déjantée, vers un propos plus grave qui vise à réconcilier pyrotechnie de la jeunesse et mélancolie du temps qui passe : « Dans la petite mansarde, sur le lit recouvert d’une couette rose, une jeune fille se vernit les ongles des orteils. Une douche de lumière matinale poussiéreuse dégouline du vasistas, la nimbant d’une couronne tremblotante. Ses longs cheveux blonds encadrent son visage d’une douceur angélique, au teint diaphane, dont les traits hésitent encore à quitter l’enfance. Un cobra pailleté argent prêt à mordre orne son tee-shirt noir trop court, révélant son nombril. La minijupe en jean relevée haut sur ses cuisses aimante le regard des trois hommes. Elle rayonne d’une grâce voluptueuse qui contraste avec son air candide et son regard bleu comme un songe d’été scrute les intrus… ».
Une jeune fille comme il faut
Auteur : Ramon Pipin
Préface de Tonino Benaquista
Editeur : Editions Carpentier (collection Les Nouveaux romanciers)
170 pages - Prix: 18, 90 euros