Antoine Leiris : « Aimer les mots sans les craindre »
- Écrit par : Félix Brun
Par Félix Brun - Lagrandeparade.fr/ Le 13 novembre 2015, au Bataclan, Hélène, fan de musique rock et surtout de la vie, jeune, élégante et jolie, « brune à la peau de lait », est morte assassinée par des êtres innommables. « Quelques hommes en colère ont fait entendre leur verdict à coups d’armes automatiques. Pour nous ce sera la perpétuité. »
Le 16 novembre, son mari Antoine Leiris publie sur son site internet : « Vendredi soir, vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine. » Cette apostrophe sans violence, sans acrimonie, a fait le tour du monde et les titres de grands quotidiens (Le Monde et der Spiegel).
Avril 2016, Antoine Leiris publie « Vous n’aurez pas ma haine » : "J’aurais aimé que mon premier livre soit une histoire, et surtout pas la mienne. J’aurais voulu aimer les mots sans les craindre." Dans son livre, il fait le récit des douze jours après la disparition d’Hélène : la recherche d’abord, avec ses doutes et ses espoirs, et puis la morgue avec les banalités des mots et la compassion dure à supporter… les obsèques…le cimetière…L’histoire d’un père et d’un petit garçon de dix-sept mois qui vont vivre « sans l’aide de l’astre auquel ils ont prêté allégeance. »
L’exercice est douloureux, poignant, déchirant ; l’écriture est belle, sensible et empreinte d’une émotion permanente. « Je n’ai pas su raconter ; ce n’est pas ainsi que les choses me sont apparues. Je n’ai pas le début, pas la fin, et chaque heure bouleverse mon être tout entier. Mon présent doit devenir passé, et j’erre dans ce quotidien sans temps, dans ces jours sans heures. »
Malgré cette blessure à jamais ouverte, Antoine Leiris donne une sacrée leçon de vie et de courage : « Nous serons toujours trois ». A propos de sa démarche, il dit de son enfant Melvil : "Je l’aiderai à garder les yeux ouverts sur la culture, sur les livres, la musique, quelle qu’elle soit, ouverts sur tout ce qui fait voir le monde par un prisme qui est à l’opposé de celui par lequel les terroristes le voient. C’est ce que sa mère lui a laissé. Il aime déjà beaucoup la musique et les livres. J’espère lui donner les armes pour qu’il se tienne debout. Mais des armes de papier, de pinceaux, de notes de musique et pas de kalachnikovs."
Vous n’aurez pas ma haine
Auteur : Antoine Leiris
Edition : Fayard
Parution : 30 mars 2016 - 12,90€