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Quand viendra la vague : une fable moderne qui nous confronte à nos contradictions quant à notre "humanité"

  • Écrit par : Xavier Paquet

vaguePar Xavier Paquet - Lagrandeparade.com/ Dans le noir quasi intégral de la nuit se distingue une vieille cabane faite de bois et de tôles ondulées : c’est l’ancienne bergerie de famille de Matéo, jeune homme qui, sur le toit, regarde les étoiles pendant qu’en bas, Letizia, sa compagne, tente de s’endormir.

L’endroit est sommaire, niché au sommet du Monte Cinto à 2700m d’altitude en Corse, avec, pour seul mobilier, un sac de couchage, des lampes, quelques pavés et un transistor.
Une vue imprenable sur la baie de l’île ? Plutôt sur l’eau qui monte, qui prend possession petit à petit de l’île de beauté. Seuls au monde, leur refuge est menacé : ils le savent, ayant des bribes d’information par la radio ; la vague arrive. En attendant, ils se questionnent sur eux-mêmes et sur la vie en général : est-ce le moment de faire des enfants ? Comment réagira la faune si l’eau envahit leur habitat ? Que faire des réfugiés qui chercheraient un abri, les accueillir ou préserver leur refuge sacré ? Et quelle place leur donner ?
Ils rentrent dans un jeu où chacun débat et évalue la pertinence de recueillir des personnes qui pourraient se présenter, toutes issues de leur propre passé. Un jeu manichéen, un brin pervers où chacun remet en question son humanité. Car tel est le fond de la pièce : face au dérèglement climatique et aux conséquences qu’il aurait sur les déplacements de population, qui sommes-nous prêts à accepter et à sauver mais aussi pour quelle vie commune et quelle société. Face à l’inévitable, chacun remet en jeu ses idéaux, le couple, symbole de la relation humaine, peut s’entraider et se soutenir ou au contraire se briser sur fond de vision non partagée. Chacun se confronte à ses contradictions entre valeurs et réalité, entre convictions et actions concrètes.

Foule sentimentale, soif d’idéal.
vagueça c’était sur le fond. Pour la forme, la pièce oscille entre réflexion profonde par l’écriture intelligente, directe et philosophique à la fois, et légèreté avec de l’humour, du second degré et de la tendresse. Un contraste entre le tragique du message et le comique de situation. Une fable moderne qui oscille entre réalisme et fiction, profondeur et simplicité. Ce parti pris de mise en scène amène de la fraicheur avec une distanciation avec le réel, une poésie fantasmée et une mise en scène simple dans la scénographie, intense dans le jeu et la variété des intentions et sentiments. De la musique jouée en live par les personnages (clarinette, accordéon) et quelques rifs de basse apportent de la noirceur, de la profondeur et une fragilité intérieure. Le travail sur les lumières, en clair-obscur bleuté donne du cachet à l’ensemble.

« Quand viendra la vague » dépeint un moment imaginaire dont l’issue est connue mais dont le réalisme dépasse la fiction : la dystopie est traitée avec onirisme comme le conte d’un rêve fou mais aux contours envisageables au vu des enjeux écologiques et climatiques actuels. Avec simplicité et poésie, la pièce nous questionne sur notre humanisme et notre tentation personnelle comme collective à un repli sur soi et un repli chez soi.
La tempête avant le calme ou le calme avant la tempête ? 

Quand viendra la vague
Texte : Alice Zeniter
Mise en scène : Florian Westerhoff
Avec Marianne Thiery, Damien Prévot et Florian Westerhoff
Musiciens :  Alex Leboeuf et Ely Checkh Athié (en alternance)
Création lumière : Vincent Lefèvre
Conception Sonore : Simon Denis
Direction musicale : Chadi Chouman
Crédit-photo : Erwan Fichou

Dates et lieux des représentations:  

Du 5 au 29 octobre 2024 au Théâtre de Belleville ( 16 passage Piver, 75011 Paris • 01 48 06 72 34)


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