Mayday Médée : la magie ne prend pas avec Lisaboa Houbrechts
- Écrit par : Xavier Paquet
Par Xavier Paquet - Lagrandeparade.com/ Mayday Médée. Non pas qu’il faille tant que ça sauver le spectacle (malgré quelques réserves que nous allons évoquer) mais les cris de rage, les cris de désespoir de Médée sonnent et résonnent plus qu’un simple cri de souffrance et qu’un appel au secours.
Il y a du domaine du viscéral dans le choix de mise en scène et de scénographie faisant de Médée le roc insubmersible de malice et de cruauté se faisant submergée par une situation qu’elle ne maîtrise pas et la rendant de moins en moins humaine dans son comportement et dans la cruauté qui l’habite.
Quittée par son mari Jason, qui lui préfère la fille du roi Créon, chassée du royaume, elle se nourrit d’une vengeance profonde et d’un ressentiment qui la conduiront à tuer la fille du roi et assassiner ses propres enfants avant de trouver refuge chez le roi d’Athènes.
Trahison d’une amoureuse éperdue, infanticide par désespoir, rage de se retrouver déclassée et rejetée de son propre royaume, émigration plus ou moins forcée ; tous les ingrédients dramatiques sont réunis dans la langue d’Euripide.
...Et pourtant l’émotion a du mal à transparaître, les mots et la passion qui animent les acteurs ne créent pas l’élan tragique auquel la pièce aspire. Le parti pris de dégenrer un personnage comme Jason, pour « renverser la misogynie, insuffler une forme de douceur, une sorte de fragilité dans le couple » selon la metteuse en scène, coupe au contraire l’approche héroïque et le combat épique entre ces deux amants, manque de puissance, d’impact, d’enjeu. Le rapport de forces s’affadit à mesure que le conflit s’adoucit. Ce qui est dommage car cela désaxe le point de bascule de la pièce et son intensité dramatique.
Par ses choix de scénographie, alternant entre l’antique et le moderne, la pièce a du mal à s’ancrer dans un moment fixe qui lui donne tout son cœur, l’épidermique violence qui en est le noyau se retrouve dilué dans certains artifices.
Pourtant, on retient de très beaux tableaux avec des jeux de couleurs, de texture, de lumière qui apportent élégance et raffinement et on apprécie le jeu tout en naturel et en présence de Médée.
Médée est autant cruelle que magicienne, par ses pouvoirs qui ont assouvi son ambition sociale mais qui la dépassent dans sa douleur et son désir de vengeance. Il manque ce soupçon de magie en plus pour que la pièce bascule en totale réussite.
Médée
Adaptation et mise en scène : Lisaboa Houbrechts
Dramaturgie : Simon Hatab
Scénographie : Clémence Bezat
Costumes : Anna Rizza
Lumières : Fabiana Piccioli
Musique originale : Niels Van Heertum
Chants : Jérôme Bertier
Son : Jeroen Kenens
Travail chorégraphique : Tijen Lawton
Maquillages : Céline Regnard
Assistanat à la mise en scène : Céline Gaudier
Assistanat à la scénographie : Nina Coulais de l’académie de la Comédie-Française
Assistanat aux costumes : Clément Desoutter de l’académie de la Comédie-Française
Dates et lieux des représentations:
- Jusqu'au 24 juillet 2023 à la salle Richelieu - Comédie Française - PARIS