Satingarona : un voyage généreux, rythmique et empreint d'énergie positive
- Écrit par : Dominique Flacard
Par Dominique Flacard - Lagrandeparade.com/ Dès les premières notes, on est conquis par la rythmique, la couleur, la générosité, la joie qui met en mouvement le corps, l'esprit. Une énergie positive se dégage de cet album marqué par le sceau du métissage. Satingarona s'impose par sa musicalité, sa force malgré la nostalgie qui baigne certaines chansons. L'empreinte de la danse y est une évidence.
Après avoir séjourné plusieurs années en Colombie, à Cali exactement, Etienne Sevet revient en France, s'installe à Lyon où il réalise qu'il est habité par toutes les couleurs musicales, les rythmes des Caraîbes. De mélomane passionné, il bascule vers la composition et crée le groupe Bongo Hop, dans lequel il tient la trompette. Le nom de ce groupe est issu d'une BD loufoque, signée Jano dans les années 80, qui a pour personnage principal un marin émèché du nom de Keubla.
Dans ce second Album Satingarona, il s'entoure de chanteuses, colombienne Nidia Gongor sur trois titres, camerounaise C Pooch sur deux titres « San Gabriel », « O na ya» , bordelaise Laurene Pierre Magnani, le MC antillais Greg Frite, le chanteur haitien Kephny Eliacin. La couleur chatoyante et quasi spirituelle des cuivres amplifie les messages des chansons, telles que La Carga ou San Gabriel, reprise du groupe Buscaja, réarrangée par the Bongo Hop.
Le discours musical de ce chant, San Gabriel, est caractéristique des chants traditionnels d'Afrique de l'Ouest; un jeu de question / réponse entre la soliste et un choeur féminin, qui répète toujours la même formule, structure cette chanson. Elle raconte l'exil forcé d'un peuple persécuté par les paramilitaires. Les cuivres lui apportent une dimension profonde, évoquant la douleur de ce peuple déraciné ; une seconde partie plus dynamique sur le plan rythmique conserve ce jeu de dialogue laissant place aux cuivres qui commentent dans un premier temps puis accompagnent. La coda, dans un tempo lent, est confiée aux voix a cappella, soliste /choeur féminin. L'unité de la chanson tient à la voix, claire et directe de la chanteuse ainsi qu'aux réponses du choeur féminin.
Sur des rythmes chaloupés, le groupe interprète des sujets grinçants, douloureux. Ainsi, La carga, interprétée par Nidia Congor, relate une anectode : les restes d'un avion vénézuélien calciné est découvert en plein désert ainsi que des traces de camion partant vers le Nord. Guitares et cuivres ajoutent à l'ambiance triste, voire oppressante. Les formules répétitives jouées par les cuivres et par la percussion, la tonalité mineure, un tempo modéré contribuent au caractère inéluctable et désolé de ce fait divers, écrit et chanté en espagnol.
Les contrastes linguistiques, vocaux, rythmiques, stylistiques correspondent à la réalité du voyage au cours duquel des saveurs, des couleurs différentes expriment des lieux, des histoires.
Le premier titre, Gren Promené, en créole, évoque la surexploitation de la terre et la déforestation en Haîti sur une samba angolaise revisitée par les cuivres; la couleur nostalgique qu'ils créent, est en opposition avec le message, porteur d'espoir : « il n'est jamais trop tard »
O na ya , quelle douceur nostalgique transmise par la voix expressive, à la fois claire et bien timbrée de C Pooch ! Quant à « L'autre quai », en Français, il est en rupture avec les autres titres !
Véritable hymne au mouvement et à la danse, cet album, qui sort le 22 Février 2019 chez Underdog, nous offre des anecdotes, des réflexions, des messages variés à la manière de la mémoire du voyageur qui stocke les informations sans les classer.
The bongo Hop/ Satingarona PT2
Underdog
Dans les bacs : 22 février 2019
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