Maria Schneider, David Lynch, Romy Schneider... : quand le ciné se livre…
- Écrit par : Serge Bressan
Par Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Le cinéma, ce n’est pas que sur grand écran. A preuve : en six livres, il se raconte. En autobiographie, confessions, souvenirs…
L’Espace du rêve de David Lynch et Kristine McKenna
On le dit fou. Et/ou sage, c’est selon. Réalisateur de (chefs-d’œuvres comme « Twin Peaks », « Elephant Man », « Dune », « Blue Velvet », « Sailor et Lula » ou encore « Mulholland Drive », l’Américain David Lynch n’a jamais goûté le jeu de la confidence. Artiste polyvalent, il jongle entre le cinéma, la télévision, la photo, la peinture et la musique. Et là , à 72 ans, lui le natif de Missoula (Montana), il s’ouvre. Pratique l’autobiographie avec « L’Espace du Rêve »… Attention, on est en compagnie de David Lynch, donc quand on dit et écrit autobiographie, c’est un livre en version « lynchienne » qu’on a entre les mains !
Quand il décide enfin de se confier, le réalisateur de Twin Peaks ne va certainement pas se contenter d’une autobiographie classique et linéaire. Non, pour ce faire, il convie une amie Kristine McKenna longtemps journaliste et critique au « Los Angeles Times », lui demande de rencontrer proches et ami(e)s, de les questionner puis d’écrire. Condition imposée par Lynch : Kristine McKenna lui adresse un chapitre dès qu’il est achevé- alors, David Lynch se met à l’écriture et rédige sa version du même événement, du même sujet, de la même période. Deux regards pour le même thème… En toute fin de livre, le créateur de « Blue Velvet » va même jusqu’à confier, dans un magnifique salto arrière : « Il est impossible de raconter la vie d'une personne. Le mieux que l'on puisse espérer, c'est de capturer le « Rosebud »- le mystère- de chacun »…
Ainsi, à l’enquête classique et journalistique de Kristine McKenna, répondent les chapitres « lynchiens », souvent drôles, également touchants. David Lynch y pointe des instants furtifs, de ces instants qui échappent même au biographe le plus méticuleux. Ainsi, le réalisateur évoque « Elephant Man » et Anthony Hopkins qui le jugeait trop juste pour mettre en images le film : « Quand vous avez cette noirceur en vous, elle doit sortir d'une façon ou d'une autre. Anthony était simplement en colère contre la vie ». Ainsi, une rencontre électrico-fugace lors d’une cérémonie des Oscars : Elizabeth Taylor « m'a chuchoté : « J'ai adoré « Blue Velvet ». Elle m'a fait signe d'approcher, je me suis penché vers elle et j'ai plongé dans ses yeux violets, avant de poser mes lèvres sur les siennes. Des lèvres incroyablement douces. Une expérience magique ».
Et la question demeure, à la sortie de la lecture de « L’Espace du Rêve » : à quoi a été nourri l’imaginaire de David Lynch, lui qui a eu une enfance heureuse, des parents bienveillants, une vie sentimentale certes chaotique mais pas contrariée ? Et si l’explication tenait tout simplement dans le fait que David Lynch ne croit qu’en « l’autorité supérieure de son imaginaire »...
L’Espace du Rêve de David Lynch et Kristine McKenna.
Editions : JC Lattès.
Parution : 19 septembre 2018.
Prix : 25,90 €.
Tu t’appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider
Ce fut l’attraction fatale du cinéma. Une jeune actrice de 19 ans, Maria Schneider, engagée dans un film que va mettre en images Bernardo Bertolucci. Le rôle principal masculin est assuré par Marlon Brando. C’est « Le Dernier Tango à Paris » en 1972. Le film va briser la vie de la jeune comédienne, piégée par le réalisateur et le comédien pour une scène (simulée) de sodomie. Vanessa Schneider, brillante journaliste, est la cousine de la comédienne, elles s’étaient promis d’écrire un livre à quatre mains. Maria Schneider, star brisée, est morte en 2011 à 58 ans, après des années de dérive, de drogues, de dépressions. Il a fallu du temps à Vanessa Schneider pour enfin se mettre à l’écriture- c’est « Tu t’appelais Maria Schneider », un texte tout en émotions et empathie.
Tu t’appelais Maria Schneider de Vanessa Schneider.
Editions : Grasset.
Parution : 16 août 2018.
Prix : 19 €.
Les nuits d’Ava de Thierry Froger
Dans les studios de la MGM, on la tenait pour « le plus bel animal du monde ». Etourdissante brune, Ava Gardner (1922- 1990) était réputée pour ses colères, pour ses caprices. Ava diva… Ainsi, en août 1958 à Rome, elle tourne dans « La Maja Desnuda », un nanar qui sera vite oublié mais elle en profite pour inventer la dolce vita. Grande admiratrice de « L’Origine du monde »- la célèbre œuvre de Courbet, elle demande une nuit au chef opérateur de la photographier dans la même pose que la femme du tableau. Qu’est devenue la photo ? Dans « Les nuits d’Ava »- son troisième roman tout aussi tourbillon qu’éblouissant, Thierry Froger mène la recherche sur cette comédienne hantée par l’idée de vieillir, sur ladite photo. Il y a de l’enquête, de la rêverie…
Les nuits d’Ava de Thierry Froger.
Editions : Actes Sud.
Parution : 22 aout 2018.
Prix : 20 €.
Romy Schneider intime d’Alice Schwarzer
Face à face, côte à côte, le 12 décembre 1976 à Cologne, deux femmes. Alice Schwarzer, journaliste et figure du féminisme, et Romy Schneider (1938- 1982), star du cinéma. Durant toute la nuit, les deux femmes échangent- l’une pose les questions, l’autre répond. Aujourd’hui, Alice Schwarzer a repris l’essentiel de cet échange pour une biographie au titre simple : « Romy Schneider intime ». Celle-ci s’y montre aussi courageuse que craintive, aussi révoltée que conformiste. Elle s’y laisse aller à de nombreuses confidences- sur sa mère (a-t-elle eu une liaison avec Hitler ?), son beau-père (qui a tenté d’abuser d’elle), un voisin qui a voulu l’emmener derrière des buissons alors qu’elle avait tout juste 5 ans… Il est aussi question d’amour pour des comédiens et des réalisateurs, et des « amours interdites » avec des femmes…
Romy Schneider intime d’Alice Schwarzer.
Editions : L’Archipel.
Parution : 29 aout 2018.
Prix : 18 €.
Maman… cet océan entre nous de Gabrielle Lazure
Un père psychiatre qui deviendra ministre des Affaires sociales du Québec. Une mère américaine psychothérapeute, fantasque et et peu attentionnée… Tôt, ils ont divorcé. Ils sont morts tous deux d’un cancer… Dans « Maman… cet océan entre nous », la comédienne Gabrielle Lazure (née à Philadelphie en 1957) a connu de jolis moments de ciné après des débuts remarqués en 1983 chez Alain Robbe-Grillet (« La Belle Captive ») et Philippe Labro (« La Crime »). A 61 ans, elle (se) raconte. « Je n’ai jamais ressenti de ta part un amour absolu. Les termes affectueux que tu emploies à mon égard sonnent faux », écrit-elle en évoquant sa mère. La comédienne raconte aussi son enfance au Québec, la drogue, ses parents, ses débuts au cinéma et son désir de maternité à plus de 40 ans…
Maman… cet océan entre nous de Gabrielle Lazure.
Editions : L’Archipel.
Parution : 19 septembre 2018.
Prix : 18 €.
La Révolution Sergio Leone de Gian Luca Farinelli et Christopher Frayling
Flash back. Année 1968, sur les grands écrans Il était une fois dans l’Ouest. Le film est réalisé par Sergio Leone, cinéaste italien peu apprécié par la critique mais salué par le public et des réalisateurs aussi fameux que Scorsese, Spielberg, Eastwood ou encore Tarantino… Concocté par l’Italien Gian Luca Farinelli et le Britannique Christopher Frayling, « La Révolution Sergio Leone » est un bel hommage au maître du western spaghetti. Sur plus de 500 pages, ce livre-catalogue de l’exposition consacré à Leone à la Cinémathèque de Paris (10 oct. 2018- 28 janv. 2019) réunit écrits du réalisateur, textes critiques, entretiens avec de proches collaborateurs et une filmographie exhaustive. Un bel hymne au western « à l’italienne ».
La Révolution Sergio Leone de Gian Luca Farinelli et Christopher Frayling
Editions : La Table Ronde.
Parution : 4 octobre 2018.
Prix : 26,50 €.