Amazonies spatiales : un recueil surprenant, qui propose quelques pépites
- Écrit par : Sylvie Gagnère
Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ Amazonies spatiales est un recueil de nouvelles et de textes scientifiques, issus d’une résidence qui a réuni auteurices de SF – chargé·es d’écrire des récits sur l’espace se déroulant en 2075 – et experts – qui devaient en garantir la vraisemblance. L’objectif affiché est de remettre l’espace au cœur de l’avenir, tout en prenant en compte la situation actuelle, le réchauffement climatique irréversible, les guerres, le capitalisme effréné, les colonialismes et néo-colonialismes qui gangrènent les rapports entre les peuples. Il s’agit ici d’inventer des futurs désirables, loin des dystopies et des tragédies qui semblent inévitables, de rêver des lendemains meilleurs…
Il est difficile de trouver une unité dans cet ouvrage, hormis dans ce rêve commun, tant les façons de le traiter sont différentes. Les thématiques sont très variées, de la place de l’intelligence artificielle à celle du réchauffement climatique, de la recherche de vie extraterrestre – avec plusieurs approches – à l’exploration de nouvelles planètes.
L’ensemble amène le lecteur à s’interroger sur notre avenir, sur les mutations profondes qui agitent notre monde, sur la manière dont nous ferons face aux enjeux capitaux pour notre survie. Avec en point de mire, l’espace, les étoiles, l’inconnu et son potentiel d’espoir et de paix. L’exploration spatiale, en replaçant la Terre dans l’immensité de l’univers, permettra-t-elle de dépasser les conflits ? L’union de l’humanité peut-elle être réalisée au regard des défis de l’avenir ?
La magnifique préface de Christiane Taubira situe d’entrée les enjeux, en rappelant l’histoire de la Guyane, les conditions dans lesquelles la base spatiale européenne s’est construite et à quel prix. Mais elle soulève aussi l’espoir que l’humanité pourra inventer un futur différent…
Sylvie Poulain, dans Vivantes, et Michael Roch, dans L’orbite de Sa Najila racontent le destin de femmes scientifiques qui choisissent de se sacrifier l’une pour que l’appât du gain ne détruise pas ce qui pourrait être une vie inconnue, l’autre pour protéger la Terre. Beaucoup de tendresse et de douceur dans ces nouvelles, soutenues par de belles réflexions sur les liens filiaux.
Claudia Del Prado Sartorius explique dans un texte limpide les notions qui ont présidé à la résidence, pour imaginer des futurs enviables : la décentralisation et le décentrement, très intéressant !
Maëlle Lapierre propose, avec Larme de Terre, un joli récit de rencontre avec une civilisation extraterrestre, qui bouleverse les points de vue. Porté par un personnage bien construit, il apporte une note d’espoir bienvenue. La toile de l’espace de Noémie Lemos montre un chemin de réconciliation de la technologie et de la nature, grâce à l’intelligence et à l’intuition. Presqu’humains de Fanny Parise, offre une solution radicale pour que l’exploration spatiale perdure, tout en préservant la planète, un renoncement à une partie de son humanité avec un retour à la nature pur et dur !
Enfin, la nouvelle de Sylvie Denis, Ce qui nous appartient, propose un chemin de réconciliation et de luttes, qui n’occulte pas le passé, mais se tourne vers l’avenir. Avec tendresse et subtilité, elle dresse le portrait d’un homme à la croisée des civilisations, qui devra faire des choix, en conciliant ses différentes identités.
Amazonies spatiales est un recueil déconcertant par sa variété de styles, mais il apporte indéniablement un éclairage important.
Amazonies spatiales
Auteurices : Silène Edgar, Maëlle Lapierre, Michael Roch, Saïd (II), Christophe Fiat, Michaël Rémond, Sophia Guermi, Sylvie Denis, Fanny Parise, Zacharie Lorent, Noëmie Lemos, Bérékia Yergeau, Sylvie Poulain, Haila Hessou
Éditions : Bragelonne
Parution : 10 avril 2024
Prix : 22 €