Max Lobe : un portrait émouvant du Cameroun durant le colonialisme
- Écrit par : Félix Brun
Par Félix Brun - Lagrandeparade.fr/ A l’issue de la Grande Guerre, la Société des Nations a partagé l’empire colonial allemand au profit des vainqueurs. Ainsi le Cameroun a été attribué pour la partie occidentale au Royaume-Uni et pour l’est à la France. Après la Seconde Guerre Mondiale, une mouvance revendique l’indépendance et la réunification du pays encore scindé : l’Union des Populations du Cameroun(UPC), avec comme emblème « un drapeau rouge marqué d’un crabe noir », et à sa tête Ruben Um Nyobé.
Max Lobe est revenu dans son Cameroun natal, pour connaître l’histoire de Um Nyobé à travers le témoignage de Mâ Malinga qui a traversé cette délicate et terrible période de lutte pour le Kundé (indépendance). Mâ Malinga alias Thérèse( chacun a un prénom d’origine camérounaise et un prénom chrétien) a toujours vécu dans son village bassa où, « La forêt est drue et crépue. Le vert est proche à la fois de l’émeraude et de la malachite.[…]Les arbres se disputent le ciel. » Cette vieille femme résolue, maligne et railleuse, qui adore le vin de palme, est marquée dans sa chair et son esprit par cette guerre coloniale, ces massacres, ces décapitations ; "Les gens mourraient comme des mouches. A un moment on ne savait plus qui tuait qui. Est-ce que c’était les gens de l’UPC avec leurs machettes et les flèches empoisonnées ou alors les gens de la police coloniale avec leurs gros fusils tara-tata-taratata ?" Après l’absurdité de l’évangélisation forcée, les prêtres "soldats de Dieu" se prêtent au jeu de la complicité avec la France coloniale. Enfermée dans des camps aussi sordides que ceux libérés quelques années plus tôt du nazisme, la population fût martyrisée : « C’était dur mon fils. Et quand je dis dur, c’est que c’était vraiment dur. Le mangement manquait. La famine était là . La soif aussi. Il y avait un petit puits quelque part dans le camp. Une eau jaune. Une eau sale. Des diarrhées diarrhéiques finissaient nos enfants. » Répression ou génocide…. ? En outre, Mâ Malinga raconte son époque avec beaucoup d’humour et de sagesse, utilisant des expressions très imagées de la culture de ces villages, de ces forêts, d’une authenticité déconcertante : avec l’âge "le temps a mangé ma tête", et "on dit que quand c’est ton jour de malchance, même une banane bien mûre peut te casser une dent."
Max Lobe remonte à ses origines, veut comprendre, savoir l’histoire de cette terre qui l’a vu naître, de cette nation qui malgré ses luttes, sa résistance au colonialisme occidental est restée dans cette sphère corrompue et malsaine appelée « Françafrique »…..un morceau d’Histoire dont nous ne sommes pas très fiers.
[bt_quote style="default" width="0" author="Max Lobe"]A la fin, on revient au point de départ.[/bt_quote]
Confidences
Auteur : Max Lobe
Editions : ZOE
Parution : février 2016