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Une semaine de lecture avec Stéphane Audeguy, Patrick Grainville et Brigitte Reimann

  • Écrit par : Serge Bressan

AudeguyPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Trois suggestions de lecture pour cette semaine. D’abord, on commence avec Stéphane Audeguy et une dystopie dans laquelle la Joconde a disparu en poussière. On enchaîne avec Patrick Grainville, de l’Académie française, et son 29ème roman racontant « Le Radeau de la Méduse » de Théodore Géricault. On boucle avec Brigitte Reimann, tenue pour l’une des meilleurs écrivains est-allemands, et un texte paru en 1963 aussi émouvant qu’implacable. Bonne lecture !

STÉPHANE AUDEGUY : « L’avenir »

Nous voici prévenus : « Disons que la fin du monde a commencé quarante années plus tôt, par une belle après-midi de juillet, humide et chaude comme une chambre d’amour ». On est à Paris, c’est la fin d’après-midi et un enfant s’ennuie au Louvre, parmi Japonais et Américains. Ce Louvre dans lequel on entre par un tombeau : « Le Louvre est une catacombe, le Louvre est l’hypogée des cultures mortes »… Dans « L’avenir », le nouvel et impeccable roman de Stéphane Audeguy, la Joconde a disparu. Elle n’a pas été enlevée ni volée, non elle est tombée en poussière- d’autres œuvres vont subir le même sort. L’affaire est d’une telle gravité que nous voilà emmenés par l’auteur dans les pas de quelques amoureux de l’œuvre de Léonard de Vinci, parmi lesquels un visiteur chinois, le conservateur au Louvre, un historien de l’art juif et allemand spécialistes des œuvres disparues… et aussi Prudence, une jeune Haïtienne orpheline, douée d’empathie et qui ne connaît rien de l’histoire puisque la sienne commence… Qu’en serait-il de la vie si l’art avait disparu ? Il suffirait, glisse Stéphane Audeguy, que deux personnes se rencontrent et réinventent l’amour… Quand l’avenir sert au présent et à cet art qui permet d’« entrevoir, dans l’éblouissement de la beauté, de merveilleuses énigmes » !

« L’avenir »
Auteur : Stéphane Audeguy
Editions : Seuil
276 pages
Prix : 21 €

grainvillePATRICK GRAINVILLE : « La nef de Géricault »

Sur un tableau XXL exposé au musée du Louvre à Paris, le visiteur voit un radeau de vingt mètres sur sept. C’est l’histoire d’un naufrage, c’est aussi « Le Radeau de la Méduse », une des œuvres essentielles du XIXe siècle peinte par Théodore Géricault. C’est aussi le sujet du vingt-neuvième et nouveau roman de Patrick Grainville, de l’Académie française : « La nef de Géricault ». Grand spécialiste de la peinture, l’auteur s’est ainsi penché sur ce qu’il appelle un « fait divers » avec ce naufrage d’un des quatre navires français envoyés jusqu’au Sénégal par Louis XVIII- sur les cent quarante-sept personnes sur le radeau après le naufrage, seules quinze ont survécu… Retour d’un voyage en Italie, Théodore Géricault- jeune peintre de 26 ans qui entretient une liaison avec sa tante, s’intéresse à l’affaire. Rencontre en 1817 deux survivants qui ont publié leur récit, s’installe dans un atelier du faubourg du Roule à Paris, peint dans une odeur pestilentielle son tableau qui sera exposé au Salon de 1819… Cinq ans plus tard, tourmenté et atteint de folie, il meurt à 32 ans après une chute à cheval. Avec « La nef de Géricault », Patrick Grainville signe un roman de belle ampleur sur une époque qui annonce le romantisme, sur la politique et la République renaissante. Sur la création, aussi…

« La nef de Géricault »
Auteur : Patrick Grainville
Editions : Julliard
322 pages
Prix : 22,50 €

reimannBRIGITTE REIMANN : « Une fratrie »

Disparue à jamais en 1973 à 40 ans, Brigitte Reimann est tenue, avec entre autres Christa Wolf, pour une des meilleurs écrivains de la littérature est-allemande. Ces temps-ci, arrive la VF d’« Une fratrie », roman publié originellement en 1963 après un passage à la censure de la Stasi- le manuscrit original n’a jamais été retrouvé. Une fratrie, c’est l’histoire d’Elisabeth, une jeune peintre, qui apprend que son frère Uli veut s’installer à l’Ouest. Il tente de la rassurer : « Ne prends pas cet air catastrophé, petite sœur, dit Uli d’une voix qui tremblait de tendresse et d’impatience. Je ne suis pas à l’autre bout du monde. Je ne pars pas vers le pôle Sud ni dans la forêt amazonienne. Je vais… d’Allemagne en Allemagne ». Comme tant d’autres artistes, au temps du régime communiste, elle travaille dans une usine de charbon, propriété de l’Etat, pour amener la culture au peuple… Donnée du problème : Elisabeth ne dispose que de deux jours pour empêcher Uli de (tenter de) partir vers l’Ouest. Dans les pages d’« Une fratrie » écrites par Brigitte Reimann, il y a des accents d’Arthur Miller et d’Henrik Ibsen… et aussi une critique de la politique et de l’art à la sauce est-allemande dans les années 1950-1960… Un roman aussi implacable qu’émouvant, intime et politique.

« Une fratrie »
Auteure : Brigitte Reimann
Traduction : Françoise Toraille
Editions : Métailié
192 pages
Prix : 21 €

 


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