Par Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Trois suggestions de lecture pour une semaine : d’abord, on commence en musique avec un formidable livre sur la soul music par un enfant du rock, du jazz et du rhythm’n’blues ; ensuite, on file en Argentine à la Bibliothèque nationale de Buenos Aires où surgissent de nulle part deux manuscrits inédits de Borges, et enfin, on se glisse dans les pas d’une jeune fille de 12 ans coincée entre la religion juive et la catholique dans le dernier roman d’un des grands auteurs israéliens. Bonne lecture !

 PATRICE BLANC-FRANCARD : « Rock my Soul »

Pas de panique, Patrice Blanc-Francard est dans la place ! Enfant de la radio, il est encore à 80 ans un enfant de la télé… Et surtout, un éternel du « enfant du rock », cultissime émission des samedis soir dans la petite lucarne durant les années 1980. Mais par-dessus tout, « PBF » est un passionné- du rock, du jazz, du blues… Magnifique loup-garou amateur des « bananas », il se rappelle à notre bon souvenir avec un livre impeccable : « Rock my Soul ». Magnifique (ra)conteur, en 340 pages, il narre l’histoire d’une musique, ce cri venu d’une communauté d’esclaves noirs et qui deviendra, assez vite un mode d’expression universel. Et qui se décline encore et encore en deux mots : « soul music ». Ainsi, jamais en reste pour une aventure voyageuse, Blanc-Francard emmène ses lectrices et lecteurs outre-Atlantique, du côté de Memphis, Detroit ou encore La Nouvelle-Orléans. Au fil des pages, les mythes et légendes défilent avec des labels comme Atlantic, Motown, Stax… Dans « Rock my Soul », on croise aussi des stars : James Brown, Otis Redding, Aretha Franklin, Stevie Wonder, Marvin Gaye, Tina Turner, Diana Ross, les Blues Brothers, Ray Charles ou encore Prince, le « nain pourpre » de Minneapolis… et aussi la jeune génération avec Anderson .Paak et Leon Bridges.

Rock my Soul
Auteure : Patrice Blanc-Francard
Editions : Calmann-Lévy
340 pages
Prix : 20,50 €

MELANIE SADLER : « Borges fortissimo »

Buenos Aires pour décor. Et le fantôme de Jorge Luis Borges (1899- 1986), le géant des lettres argentines pour illuminer « Borges fortissimo », le troisième et nouveau roman de Mélanie Sadler après les impeccables « Comment les grands de ce monde se promènent en bateau » (2015) et « Dans les pas de Barbara Davalo » (2018). Cette fois, ça bouillonne à la Bibliothèque nationale de Buenos Aires : on vient d’y découvrir deux manuscrits inédits de Borges. Deux romans, alors que l’auteur argentin n’a publié que des nouvelles. Le premier manuscrit reprend l’ensemble des nouvelles pour en faire « l’œuvre parfaite », le second met en avant une figure féminine. Les questions fusent : Borges est-il vraiment l’auteur de ces deux manuscrits ? Dans le même temps, la jeune Pia commence son service dans l’échoppe d’El Patrón puis elle rejoint ses amis dans une bouquinerie où l’on débat du sujet du jour : les manuscrits de Borges. L’ex-président Cástor Manam assure que, oui, l’écrivain a bien écrit lesdits manuscrits qu’il lui avait confiés avant qu’ils ne disparaissent- une version dont doute la célèbre journaliste Beatriz Garcia Garcia. Avec « Borges fortissimo », Mélanie Sadler signe un texte aussi virevoltant qu’enthousiasmant au pays des généraux et de Diego Armando Maradona…

Borges fortissimo
Auteure : Mélanie Sadler
Editions : Flammarion
258 pages
Prix : 19 €

AVRAHAM B. YEHOSHUA : « La Fille unique »

Rapidement résumé, on pourrait écrire : une jeune fille de 12 ans a été privée de crèche. Oui, ce pourrait être le résumé de « La Fille unique », l’ultime roman d’Avraham B. Yehoshua, tenu pour l’un des plus grands écrivains israéliens contemporains et mort le 14 juin 2022 à 85 ans. Yehoshua, c’est des livres étourdissants dont « Rétropsective », prix Médicis étranger 2012. Avec « La Fille unique », l’auteur emmène ses lectrices et lecteurs en Italie mais ne l’indiquera qu’en fin de volume. Il y a un père avocat juif à peine pratiquant et une mère catholique convertie au judaïsme lors de son mariage. Il y a aussi Rachele, leur fille- elle a 12 ans et son institutrice l’a choisie pour jouer Marie dans un spectacle sur la Nativité. Le père s’oppose à ce que sa fille interprète une chrétienne mais lui dit : « Tout ce que je dis ne doit pas être sacré à tes yeux », la mère n’est ni pour, ni contre et surtout est préoccupée par une autre nouvelle, relative à la santé de son mari. Il y a aussi le grand-père, avocat qui, pendant la Guerre, s’est déguisé en curé pour sauver sa famille- il est pour que sa petite-fille navigue d’une religion à une autre. Ne pas oublier enfin le « rabbin sympa » qui ne trouve pas d’épouse à Jérusalem et vient en Italie dans l’espoir d’en trouver une…

La Fille unique
Auteur : Avraham B. Yehoshua
Editions : Grasset
210 pages
Prix : 19 €