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La mort est mon métier : le monologue d'un criminel nazi brillamment interprété

  • Écrit par : Julie Cadilhac

mortPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Rudolf Hoess était le commandant du camp d'Auschwitz. "La mort est mon métier" est le roman de Robert Merle inspiré par la vie de cet être à la destinée noire.

Franck Mercadal en a imaginé une adaptation brillante tant par le choix de découpage du texte que par l'incarnation époustouflante du personnage principal, de son épouse et des divers individus qui le côtoient. L'acteur et metteur en scène a créé un monologue qui reflète ingénieusement la personnalité de Rudolf Hoess : la scénographie très épurée est traversée seulement de douches de lumières aux couleurs glaçantes; le jeu est aussi tenu que rigoureux, d'une perfection métronomée.
Franck Mercadal narre l'histoire d'un homme qui n'a jamais su qu'obéir. De son enfance sous le joug d'un père autoritaire et violent à son adhésion au premier travail au sein du parti pour former un escadron de SS, de son premier poste dans l'administration du camp de Dachau jusqu'à sa nomination de directeur d'Austchwitz où il orchestre la solution définitive du problème juif en Europe, l'on côtoie un être troublant, félicité pour ses talents d'organisateur et qui applique avec une rigueur implacable les ordres de ses supérieurs hiérarchiques. Sans prise de conscience, s'estimant dédouané de culpabilité parce qu'il se contente d'exécuter les décisions d'autres.

[bt_quote style="default" width="0"]Je ne suis qu'un rouage et rien d'autre. [/bt_quote]

L'écriture de Robert Merle ( Ed. Gallimard. 1ère publication 1952 ) est d'une puissance évocatrice dérangeante; elle réveille notamment des sensations insupportables de réalisme lorsqu'elle évoque la nécessité de gestion des fosses, les calculs froidement techniques des manières les plus rapides de brûler les corps ou encore les inconvénients et avantages des chambres à gaz et des fours crématoires. Franck Mercadal accentue encore ces impressions douloureuses en rapprochant des scènes sur les réalités administratives du quotidien d'un camp d'extermination à des épisodes du quotidien familial de Rudolf où l'on berce , par exemple, un enfant sur une mélodie de Noël.

[bt_quote style="default" width="0"]Le Reich Führer pense que c'est dans un camp que je serai le plus utile.[/bt_quote]

Alternant avec une rapidité prodigieuse les locuteurs, Franck Mercadal épate par sa capacité à multiplier les visages et les corpulences, exécute un Himmler qui glace d'effroi, avec un cynisme et un sadisme retenu aussi remarquables que ceux de Christoph Waltz qui incarnait un colonel nazi dans Inglourious Basterds de Quentin Tarantino( rôle qui lui avait valu un Prix d'Interprétation Masculine à Cannes, en mai 2009 ainsi que l'Oscar du Meilleur Second Rôle Masculin).

Le portrait saisissant d'un chemin de vie intolérable pour l'entendement: d'un homme ordinaire à un criminel nazi. Lorsqu'enfin se dessine le procès de Nuremberg, le public retient son souffle, sonné par l'effrayante insensibilité d'un bureaucrate consciencieux. Bravo à Franck Mercada pour cette performance exceptionnelle!

[bt_quote style="default" width="0"]Mon devoir était d'obéir.[/bt_quote]

 

Ma mort est mon métier

Interprète(s) : Franck Mercada

Scénographe : Olivier Prost

Constructeur décors : Marc Amiot

Musique originale : Wilfried Wendling

Création Lumière : Raymond Yana

Durée : 1h

Dates des représentations :

- Du 7 au 30 juillet 2016 - relâche les 12, 19, 26 - à l'ESPACE ALYA ( 31 bis, rue Guillaume Puy - 84000 Avignon ) à 17h20 - Festival Avignon Off

- Du 31 janvier au 5 février 2017 au Théâtre de l'Epée de Bois ( Paris)
 

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