Par Xavier Paquet - Lagrandeparade.com/ Inspiré d’un fait divers qui s’est déroulé aux Etats-Unis, « ADN Â» mêle fiction et réalité et apporte une dimension de thriller peu fréquente au théâtre.

Tomas et Karen forment un couple heureux qui vient de vivre pour la première fois les joies de la maternité. Mais cette naissance qui se devait être un jour merveilleux déclenche un drame quand Georgia, responsable de la clinique, annonce au couple qu’au vu de son ADN, Tomas n’est pas le père mais l’oncle du nouveau-né ; génétiquement c’est son frère le papa de l’enfant. Problème : Tomas n’a pas de frère et Karen n’est pas infidèle. Et quand Tomas veut connaître son histoire cachée, sa mère meurt brusquement assassinée.
L’histoire va de rebondissements en rebondissements, la chasse à la vérité et aux fausses informations monte crescendo, les péripéties s’enchaînent pour dénouer les secrets de l’histoire familiale où les non-dits répondent aux traumatismes. L’ensemble est très rythmé et l’aventure se veut intense avec une succession de scènes faisant progresser l’intrigue, entrecoupées de passages narratifs qui recontextualisent. Car les nÅ“uds sont nombreux à démêler pour Tomas : qui est le meurtrier de sa mère ? Qui est son véritable père ? A-t-il un frère caché ? Et que cache Georgia dans ses mystérieuses recherches cliniques ? Et Sam, cet ancien meilleur ami qui réapparaît dans sa vie ?

C’est à la fois la richesse et le problème de la pièce : une histoire de plus en plus rocambolesque jusqu’à en perdre une certaine authenticité et véracité et qui perd la dynamique du thriller en s’étiolant en longueur. Le texte aurait mérité d’être réduit pour garder son essence narrative et sa dynamique d’enquête personnelle au lieu de croiser autant d’intrigues. Au-delà de cela, la mise en scène ingénieuse fait tout le charme de la pièce : des palissades coulissantes délimitent les espaces de jeu passant d’un appartement à la clinique, de la rue à une chambre. Les projections vidéo sont utilisées à bon escient pour ancrer le décor avec des vues magnifiques de New York ou Washington, d’une église ou d’un ciel enneigé.

La scénographie casse le quatrième mur pour nous embarquer dans ce jeu de pistes et apporter de l’immersif dans le jeu où la course poursuite se déroule en partie au milieu du public. Pris à témoin, nous sommes les complices d’un soir et cela apporte de l’action pour revitaliser l’intrigue. Elle reprend des codes cinématographiques dans son traitement très léché et orchestré avec une luminosité recherchée.

La pièce reprend les aspects du thriller dans sa forme narrative et dans sa construction temporelle entre espaces temps et flash-back : elle n’en oublie pas des moments de répit et de légèreté avec pas mal d’humour et de moments fantaisistes qui viennent aussi dédramatiser l’enjeu dramatique. Très divertissante, elle adopte les codes des séries actuelles dans la recherche scénique et les mélanges d’intrigues à tiroir où la quête d’identité fait écho à un bouleversement familial. Un cluedo des temps modernes sur fond d’histoire personnelle, de psychologie intime et de secrets bien gardés.

ADN

Texte : Caroline Ami, Flavie Pean
Avec Benoit Facerias, Anne Plantey, Alexandre Guilbaud, Valérie Even, Judith, D'Aleazzo, Eric Pucheu
Mise en scène : Sébastien Azzopardi

Dates et lieux des représentations: 

- Jusqu'au 28 décembre 2024 au Théâtre Michel ( 38, rue des Mathurins, 75008 Paris)