La course des géants : conquête spatiale et Guerre Froide, un contexte détonnant pour un spectacle touchant, à la mise en scène très inventive
- Écrit par : Sylvie Gagnère
Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ 1960, la course aux étoiles est lancée. Les deux géants (États-Unis et URSS) se livrent une guerre qui, pour être froide, n’en est pas moins sans merci.
Jack Mancini vit à Chicago, son père est mort, sa mère droguée. Il travaille dans une pizzeria dont le patron l’a pris sous son aile, collectionne les gardes à vue en raison de sa propension à régler les conflits par la violence, et se plonge dès qu’il peut dans les livres. Parce que Jack a une passion : l’espace. Son rêve ? Devenir astronaute. Mais ce n’est qu’un rêve pour ce garçon qui n’a même pas fait d’études. Lorsqu’un professeur de psychologie détecte son potentiel intellectuel exceptionnel et lui obtient une bourse pour une prestigieuse université, son destin bascule.
La course des géants s’inspire librement de faits réels et en particulier de la mission Apollo 13 – celle du fameux « Houston, on a un problème ». Les moments clés de la conquête spatiale sont vus par les yeux de Jack Mancini : le premier satellite dans l’espace, le légendaire discours de Kennedy, le premier pas sur la lune, la capsule Apollo 13. Et si ce personnage est fictif, le contexte dans lequel il évolue, celui de conquête spatiale et de la Guerre Froide, est parfaitement réel. Le spectacle entremêle le rêve américain et celui d’un jeune homme à la poursuite de son désir d’enfant : devenir astronaute. Petite et grande histoire se mêlent, pour former un kaléidoscope de moments forts, ponctués de choix et de rencontres qui permettront aux uns et aux autres de réaliser, ou non, leur rêve.
Six acteurices pour une trentaine de personnages et pas loin d’une vingtaine d’années, la performance peut être saluée. Jordi Le Bolloc’h campe un Jack enthousiaste, irréfléchi, rêveur et impulsif, somme toute très attachant. Son évolution tout au long du récit est tout à fait crédible et donne le ton d’une pièce prenante. Éric Chantelauze est un professeur de psychologie plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord, sincère et manipulateur à la fois. Nicolas Lumbreras apporte une dimension sensible et drôle à chacun de ses rôles, tandis que Sophie Picard incarne avec finesse la femme de Jack, une chanteuse au grand cœur, et aux rêves tout aussi grands. Les dialogues ciselés sont ponctués de touches d’humour. La reconstitution historique est à la hauteur, reconstituant parfaitement l’ambiance des années 60/70.
Toutefois, la plus belle force du spectacle, c’est sa mise en scène, d’une formidable inventivité, qui use très intelligemment de la vidéo pour transporter les spectateurs d’un aéroport à une pizzeria, d’une bibliothèque à la salle de contrôle de la NASA… Agrémentées d’images (et de sons) d’archives qui nous propulsent au cœur de cette folle époque, les projections s’intègrent parfaitement dans un décor simple, mais très ingénieux. Le rythme est sans temps mort, et l’énergie qui se dégage de la représentation communicative !
Les références cinématographiques sont bien présentes : Apollo 13 bien sûr, mais également Will Hunting ou Billy Elliot. La réalisation de ses rêves, la quête de ce qui semble impossible sont au cœur de ces œuvres, comme de la pièce. On passe un très bon moment, portés par l’énergie des acteurices, l’intelligence de l’écriture et la virtuosité de la mise en scène. C’est aussi un spectacle à voir en famille, nul doute que les enfants et adolescents découvriront avec plaisir ces pionniers de la conquête spatiale et la singularité d’un monde bipolaire !
La course des géants
Production : Théâtre des Béliers Parisiens
Texte et mise en scène : Mélody Mourey
Avec : Jordi Le Bolloc’h, Anne-Sophie Picard, Nicolas Lumbreras, Alexandre Texier, Valentine Revel-Mouroz et Eric Chantelauze
Vidéos : Raphaël Foulon
Lumières : Arthur Gauvin
Scénographie : Olivier Prost
Durée : 1 h 40
Dates et Lieu des représentations :
-Du 9 juillet au 30 septembre 2021 : du mardi au samedi à 21h, le dimanche à 15h au Théâtre des Béliers Parisiens – 75018 Paris