Par Elodie Cabrera - Lagrandeparade.fr/ Un appartement minimaliste, presque aride, offrant une vue vertigineuse sur des tours d’immeubles illuminées. C’est dans cet aquarium que déambule Ida, une jeune fille esseulée, refusant tout contact humain, bien qu’ils s’invitent avec insistance dans sa prison-cocon. La sœur soucieuse l’harcèle derrière l’écran du digicode. Un mec, un coup d’un soir, la bombarde d’appels et de textos libidineux. L’aimé, photoreporter parti couvrir la guerre en Syrie lui envoie de rares missives électroniques pour tenter de maintenir en vie une relation qui semble se déliter.

Ida regarde le soleil se lever et se coucher depuis sa fenêtre, erre la nuit sur Internet, saute d’un site à un autre, vapote sur sa cigarette électronique, répond par contrainte aux coups fils, et descend du vin jusqu’à en avoir le tournis. Le monde s’invite dans sa vie mais elle se referme sur elle-même. Elle incarne la désincarnation de notre société où le digital empiète sur l’intimité, nous consume, nous dilue.

On peut encore saluer la créativité du metteur en scène Cyril Teste et le collextif MXM dont le langage multimédia renouvelle avec brio la narration au théâtre. Ici, comme lors de leurs précédentes créations tel que Nobody, l’écran n’est pas un simple décor, mais un personnage à part entière. Sur la fenêtre numérique qui s’interpose ente Ida et le monde apparaissent les alertes d’informations et leurs déluges de mauvaises nouvelles, les fenêtres pop-up renfermant des offres commerciales ou coquines. L’écran se fait le lit d’une déshumanisation, et même lorsqu’il révèle le visage d’Ida sur sa webcam, c’est encore avec une imagerie pixellisée et saccadée qu’elle prend corps, ou perd corps pour être plus juste.
Si le scénario de départ nous charme, structuré par les textes de Pauline Peyrade, une vacuité nous sème en cours de route. Le personnage d’Ida s’enlise dans une misère émotionnelle qu’on ne peut imputer aux nouvelles technologies. Éméchée, isolée, peut-être psychotique, elle finit par délirer et tenir des discours sans queue ni tête. Elle frôle presque la caricature. Finalement Ctlr-X parle bien plus de dépression que de dématérialisation, d’une insomniaque aux tendances schizophrènes que de la déliquescence des rapports humains dans notre société du tout digital.  

Ctlr-X
avec Adrien Guiraud, Agathe Hazard-Raboud, Laureline Le Bris-Cep
texte : Pauline Peyrade
mise en scène : Cyril Teste
assistanat à la mise en scène : Marion Pellissier
scénographie : Collectif MxM
création lumière  :Mehdi Toutain-Lopez
Régie lumière et régie générale : Laurent Bénard
création vidéo : Patrick Laffont et Nicolas Doremus
musique originale : Nihil Bordures
construction décor : Artom Atelier
interprétation en live : Nihil Bordures ou Jérôme Castel
administration, production et diffusion : Anaïs Cartier, Florence Bourgeon et Coline Dervieux
relations presse : Olivier Saksik, Delphine Menjaud-Podrzycki et Karine Joyeux

Durée : 50 min

Dates et lieux des représentations:
-Du 9 au 20 janv. à 19h30 au Monfort Theatre - Paris
- Du mer. 24/01/18 au jeu. 25/01/18 à Saint-Quentin-en-Yvelines - Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines- Tel. +33 (0)1 30 96 99 00
- Du mar. 13/02/18 au mer. 14/02/18 à Marseille Le Merlan- Tel. +33 (0)4 91 11 19 20
- Du jeu. 12/04/18 au ven. 13/04/18 - Lille Le Grand Bleu -Tel. +33 (0)3 20 09 88 44