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Tout est bien ! : l’art du dépareillé de foulosophes optimistes

  • Écrit par : Julie Cadilhac

Tout est bienPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Entrée en fanfare. Sur la piste, un décor de bric et de broc rehaussé de personnages hauts en couleur et forts en gueule. Une zézette nous accueille avec une gouaille de poissonnière, les costumes sont volontairement d’une harmonie douteuse ( même si le style talon-chaussette finit par être irrésistible) et le déjanté nous ouvre grand ses bras!

C’est parti pour le show circassien des rois de la bricole et l'«on est embarqué » immédiatement à dos de balancelle ou en équilibre précaire sur des bancs empilés car « tout va à une cadence endiablée ». En compagnie de Maggie, princesse à la dent noire, de l’illuminé philosophe, du gros malabar pas commode, roc au coeur tendre, du travesti à boucles rousses, de Coluche le régisseur et du ténor équilibriste, vraiment, quel joyeux bordel ce chapiteau! Le génie de la Cie Pré-o-Coupé? Être une formidable démonstration de ce que le cirque nécessite d’équilibre et de rigueur malgré son apparente complaisance dans le n’importe quoi. Dans « Tout est bien! », on aime tout mais particulièrement les textes qui s’intercalent entre chaque numéro et la capacité naturelle et ébouriffante de ces joyeux drilles à nous entraîner dans leur ronde. « Tout est bien! » c’est une invitation au lâcher-prise, à la spontanéité et à la fantaisie. Ils l’affirment devant nous «  un cirque, c’est un peu comme un navire » et parce qu’ils aiment filer les métaphores, nous voilà partis pour une croisière qui nous réserve moultes surprises. Christian Lucas a assurément un grand sens de la mise en scène pour ces clowns à la complicité avec le public indéfectible, qui viennent exécuter des acrobaties au milieu des gradins, s’improvisent fontaines et c’est presque Versailles, dissertent sur la théorie socio-économique de la main invisible d'Adam Smith, font du trapèze-escabeau perruque orange fluo cirquedans le vent et bas résilles maillés, réinventent Baudelaire ( Que ce "Je suis belle, ô mortels" est amusant! ) et en font une délicieuse démonstration de ce que la laideur et le mauvais goût peuvent être sublimés par la poésie. Que dire de plus? Outre sa cocasserie et son lot de performances de qualité, ce spectacle se veut aussi une leçon de vivre ensemble à la pédagogie efficace…D’ailleurs rien n’est oublié, même pas d'où l'on vient et le clown traditionnel a droit à son hommage....On révise même l’anglais avec Serge et Jackson, c'est vous dire!

Allez les voir si, par chance, leur chapiteau échoue non loin de chez vous : juste pour rencontrer Maggie et son perroquet Paco aux plumes en sacs plastiques, vivre une croisière s’amuse - version Pré-o-Coupé - où l’on ne s’ennuie pas une seconde entre prise d’otages, requin en vue et la jupe de Marilyn - qui s’achève en radeau de la Méduse enchanté, pour croiser une flûte à bec et d’affreux méchants qui n’ont peur de rien ou encore un monstre d’équilibre précaire…et finir la tête en équilibre dans les étoiles! 

Vous n’imaginez pas tout ce que l’on peut faire avec quelques planches, des récipients de diverses tailles, des costumes dépareillés et du talent!

[bt_quote style="default" width="0"]Et même si c’est pas bien et ben c’est bien.[/bt_quote]

tout est bien Quelques questions à Nikolaus : 

Comment raconter des histoires marrantes dans un monde en crise et qui n'est pas marrant ? ...est-ce une question que vous vous êtes toujours posé depuis que vous créez des spectacles? Cette problématique n'est-elle peut-être pas toujours l'essence même du travail circassien...? ...Le clown n'est-il pas celui qui transforme les larmes en rires?

Oui, c'est la question que je me pose à chaque création ! le rire, le clown, mais aussi l'exploit, qui, quand il est convenablement partagé, n'inspire pas l'admiration et le respect, mais rend chacun plus fort et plus audacieux.

Qu'est-ce qui vous porte dans l'écriture sous chapiteau?

Le chapiteau invite à la création d'une famille. C'est de cela que j'avais envie en créant sous chapiteau. Et ça a marché ! 7 ans après la création, nous sommes tous là, avec l'envie intacte.

« Le chapiteau ne tient pas. » Il doit « participer à ce naufrage de ce cirque du fin du monde. » Est-ce une manière de rappeler que le spectateur ne doit pas être simplement passif, qu'il doit aussi accepter de prendre un risque? Est-ce une volonté de l'impliquer parce que votre cirque est aussi - en quelque sorte - engagé?

Ce qui importe, c'est que le spectateur oublie qu'il est spectateur. Il doit oublier qu'il a payé sa place, quel jour on est, il doit être absolument au présent. Il voit qu'avec pas grand chose on peut faire des trucs dingues. Et que surtout quand on est plusieurs c'est beaucoup plus rigolo.

tebRevenons à « Tout est bien! » ...puisque vous dîtes que « les Titres sont programmes »...auriez-vous l'amabilité de nous expliquer comment est né celui-là? Doit-on l'entendre comme une antiphrase ironique?

J'ajoute souvent un sous-titre à mes titres... ici, c'est Catastrophe et bouleversements, parce que oui, tout est bien... mais cela ne va pas sans mal !

Tout Est Bien ! Catastrophe et Bouleversement
Nikolaus Holz – Christian Lucas – Cie Pré-O-Coupé
Une idée de Nikolaus Holz
Mise en scène : Christian Lucas
Scénographie :  Raymond Sarti assisté de Jean-Baptiste Hardoin et Benjamin Fanni
Musique : Olivier Manoury
Création lumière : Hervé Gary
Costumes : Fanny Mandonnet assistée de Claire Joly
Collaboratrice artistique :  Bérangère Gros
avec Noémie Armbruster, Yannos Chassignol, Julien Cramillet, Mathieu Hedan, Karim Malhas, Nikolaus

(Découvert en mars 2017 à Frontignan La Peyrade dans le cadre de la saison de la Scène Nationale de Sète et du Bassin de Thau ( 34))

 

Dates et lieux des représentations: 

- Du 11 au 20 juin 2019 sous chapiteau - Domaine d'Ô - Montpellier - Dans le cadre du Printemps des Comédiens

- Du 16 au 20 Novembre 2019 au Théâtre de la Fleuriaye - Carquefou

Nikolaus

 

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