My love affair with marriage... : un film d’animation atypique, à l’humour bien présent et qui aborde un sujet toujours d’actualité
- Écrit par : Sylvie Gagnère
Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ Zelma est une petite fille née sur les îles Kouriles, qui grandit en Lettonie, alors partie intégrante de l’URSS. La société lui intime de se conformer à l’image idéale de la femme : jolie et soumise, qui ne saurait être heureuse hors du mariage et des enfants, et doit rester vierge pour son futur époux.
La voix de la tradition est représentée par trois « sirènes » mythologiques (entre nonnes et harpies en terme d’image), qui chantent leurs injonctions sans relâche, pour que Zelma les intériorise : elle doit être douce et calme, elle doit apprécier toutes les marques d’attention des garçons, fussent-elles des brimades, être mignonne et bien habillée, apprendre à cuisiner, ne pas faire d’ombre aux mâles, ne pas montrer son intelligence ou sa force…
Mais Zelma est une petite fille, puis une adolescente et une adulte curieuse, vive, loin des poncifs de la « femme idéale », ce qui occasionne nombre de conflits internes. Elle trouve un fiancé, se marie très vite, mais le conte de fées coince aux entournures, quand le mari révèle ses penchants machistes et dominateurs. Zelma peine à concilier les injonctions dont on l’abreuve depuis son enfance, et la liberté à laquelle elle aspire.
Le film retrace le parcours de déconstruction de l’héroïne, aussi bien sur les valeurs associées à la féminité que, plus largement, sur les questions de genre.
L’originalité de My love affair with marriage ne tient pas tant dans son sujet que dans les choix graphiques et scénaristiques qui ont été faits. Nous avons déjà parlé des sirènes, voix de la tradition, mais ce n’est pas la seule belle invention de ce long-métrage. La personnalité forte et libre de Zelma est matérialisée par une chatte en colère, qui veut se défendre et résister. Le film est également entrecoupé de passages, présentés par un neurone, qui expliquent ce qui se passe au niveau de la biologie et de la neurobiologie lorsque Zelma est heureuse, énervée, amoureuse, bridée, lorsqu’elle se rebelle et fait face au sexisme et à la violence.
Le style graphique est assez déconcertant au premier abord et la structure peu commune. Les apartés scientifiques sont parfois un peu longs et redondants, et le film aurait pu être un peu resserré et raccourci. Pour autant, il aborde avec finesse et discernement les embûches de la construction sociale de la femme, en sachant être encore d’actualité, même si le contexte semble avoir évolué. Drôle et touchant, son originalité et son intelligence en font une oeuvre à voir !
My love affair with marriage...
Réalisatrice : Signe Baumane
Scénario : Signe Baumane
Animation : Signe Baumane, Yajun Shi et Yupu Ding
Sortie en salles en France : 7 juin 2023
Mention du jury au Festival d’Annecy (2022)
Genre : animation
- Durée du film : 108 minutes