Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.com/ Grand Nord canadien. Mia, petite fille née en Australie, s’enfuit avec sa mère d’un complexe scientifique où des expériences sont menées sur elle.

Lorsqu’elle se retrouve seule, elle erre dans les plaines enneigées, tandis que le feu brûle en elle. À quelques kilomètres, Nathanaël, jeune musicien français, tente d’échapper au souvenir de l’incendie qui l’a happé et traumatisé, enfant. Il parcourt le monde pour enregistrer les traditions orales, les sons menacés de disparition. Cadzow, son guide inuit, approuve son projet. Mais lui aussi est affecté par le feu. Quand il abat un ours affamé rôdant dans le village, leurs destins vont devenir intimement liés. Le feu consumera-t-il tout sur son passage ?

Les trois héros de ce court roman sont marqués à vie par leur rencontre avec un incendie. Certes, ils ont survécu, mais leur existence en a été bouleversée et leur âme dévorée. Aurélie Wellenstein nous emporte au cœur des traumatismes de ces êtres écorchés, leur donnant chair au travers de leur faculté de faire vivre le feu, et de sentir et comprendre les souffrances des animaux. La culpabilité qui les ronge, l’angoisse de ne pas pouvoir maîtriser l’enfer des souvenirs qui brûle en eux, s’incarne dans un pouvoir onirique, des forces surnaturelles qui les transcendent. Chacun d’entre eux est porteur d’une voix puissante, à la recherche d’une impossible rédemption, pour eux, mais également pour les humains, coupables de toutes ces souffrances. L’autrice forge le portrait de personnages profonds, qui évoluent au fil du récit et de leurs découvertes. L’originalité indéniable du lien qui les unit aux animaux est remarquable !

Aurélie Wellenstein nous offre un roman poétique et furieux, onirique et violent. Au fil de la course-poursuite qui s’est engagée, les trois héros de cette aventure vont nous faire partager leur douleur, leur colère, leur désespoir, leur espoir aussi d’un monde où les humains et la nature cohabiteraient pacifiquement. Comme dans Mers mortes, de la même autrice, les animaux massacrés hantent le récit, mais ici avec une douceur qu’incarne Mila. La fillette offre la promesse d’un autre lendemain possible, à ses compagnons, et à nous, lecteurs. La violence est présente, celle des hommes, la souffrance également, des animaux qui brûlent en silence dans les méga-feux, dont nous nous réjouissons qu’ils n’aient fait « aucune victime ».

Mais une petite fille et deux jeunes hommes portent l’espérance, une voie d’apaisement et de respect qui nous tend les bras.

La fille du feu 
Autrice : Aurélie Wellenstein
Éditions : Fleuve
Parution : 7 mai 2025
Prix : 19,90 €