L’été et la mer : une dystopie tristement d’actualité, sur les effets du dérèglement climatique, visionnaire !
- Écrit par : Sylvie Gagnère
Par Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ 2041, les glaces des pôles ont fondu, les eaux ont envahi une bonne partie des terres.
Les dix milliards d’habitants se répartissent en deux castes : les Stables, qui ont un travail et une vie relativement confortables, et les Souilles, qui vivent dans la misère. Les Conway sont des Stables, jusqu’au jour où la perte de son emploi du père précipite toute la famille à la lisière du quartier Souilles, dans la Frange. La mère et ses deux fils, Francis et Teddy, vont devoir s’adapter, découvrir ce quotidien faite de violence et de débrouillardise.
Le roman est une formidable dénonciation du capitalisme, responsable du dérèglement climatique. Il a été publié pour la première fois en 1987, alors qu’il était sans doute encore temps d’agir de façon drastique pour éviter cet avenir sombre. Dans cet ouvrage, le système financier (et économique) s’est effondré, une (toute) petite partie de la population possède les richesses, les autres se contentent des miettes, parqués dans des tours insalubres que grignote la montée des eaux. On leur donne le minimum vital afin de prévenir toute révolte. Une pseudo-démocratie régit l’ensemble, à coup de contrôle des cerveaux et des corps. Dans ce cadre triste et froid, l’auteur s’attache à ses personnages, racontant son histoire au plus près de leurs émotions. Les récits entrecroisés des protagonistes donnent à voir un monde brutal, en proie à une crise politique, économique, sociale et culturelle. Plusieurs de ses héros, à commencer par les deux frères n’ont rien d’aimable, ou d’attachant, ils se débrouillent, à coup de lâchetés et de compromissions, pour survivre et (re)trouver leur place.
La première partie du récit – qui se déroule bien après les événements racontés - ne m’a pas convaincue, et j’ai failli lâcher avant de plonger dans l’histoire proprement dite, qui se révèle un roman social autant qu’une dystopie, disséquant les mœurs avec une acuité féroce. Le système de castes est extrêmement bien conçu, et fort réaliste, hélas ! On referme l’ouvrage avec un mélange de dégoût et de colère, une amertume profonde en pensant à l’avenir. S’avérera-t-il aussi sombre que l’a imaginé Georges Turner ? Souhaitons que non !
L’été et la mer
Auteur : George Turner
Éditions : Mnemos
Collection : Mu
Parution : 13 mars 2024
Prix : 23 €