Silvina Ocampo : la dérive poétique
- Écrit par : Serge Bressan
Par Serge Bressan - Lagrandeparade.fr/ Un roman posthume. Joliment titré « La Promesse », signé par l’écrivaine argentine Silvina Ocampo. Immédiatement, on est plongé dans l’immensité de l’océan. Un paquebot pour une traversée transatlantique. Soudain, une femme analphabète tombe à l’eau. Elle flotte, elle dérive, s’en remet à sainte Rita- la sainte patronne des femmes mal mariées, des causes désespérées et des choses impossibles. Lui promet, si elle s’en sort saine et sauve, d’écrire l’histoire de sa vie. C’est « La Promesse », le roman posthume de Silvina Ocampo (1903- 19993), grand nom de la littérature d’Argentine. Après avoir étudié le dessin et la peinture à Paris avec Giorgio de Chirico et Fernand Léger durant sa jeunesse, elle se consacre à la littérature à partir de 30 ans. A ses côtés, de belles et grandes figures littéraires : son mari Adolfo Bioy Casares, son ami Jorge Luis Borges qui voit en elle « l’un des plus grands poètes de langue espagnole », sa sœur Victoria Ocampo qui a fondé la revue et maison d’édition SUR… « La Promesse » (publiée en Argentine en 2011 grâce au travail d’Ernesto Montequin sur le manuscrit) symbolise parfaitement l’œuvre de Silvina Ocampo, aussi discrète qu’attachée à son indépendance. La marque de fabrique Ocampo, c’est le mix toujours réussi entre l’humour et l’ironie, et surtout la brièveté du texte. A la sortie du livre, un journal argentin a écrit : « ‘’La Promesse’’ est un roman nécessaire dans l’œuvre de Silvina Ocampo, une synthèse de sa poétique marginale et excentrique, toujours à contre-pied, toujours originale ».
Flottant dans l’eau atlantique, la femme à la mer voit défiler les personnages de sa vie. C’est un véritable dictionnaire de souvenirs. On lit : « J’ai nagé ou fait la planche durant huit heures, en espérant que le bateau revienne me chercher. Je me demande parfois comment j’ai pu nourrir cet espoir. Je l’ignore vraiment. Au début j’avais tellement peur que j’étais incapable de penser, puis je me suis mise à penser de façon désordonnée… » Dans un avant-propos empreint d’intelligence, Ernesto Montequin précise : « L’auteure et ses personnages semblent, par moments, y partager la même voix ». Silvina Ocampo rappelait avec plaisir que « La Promesse » représentait vingt-cinq ans de travail, et tenait ce roman comme le plus abouti de tout ce qu’elle avait écrit. La romancière argentine nous offre un roman fanstamagorique, jouant des conventions littéraires, emporté par le flux de la conscience et la force de la métaphore. Une belle et enthousiasmante dérive poétique…
La Promesse
Auteur : Silvina Ocampo
Editions : des Femmes- Antoinette Fouque
Parution : 13 avril 2017
Prix : 13 euros