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« 2019 » : Ohad Naharin et la Batsheva, la claque de Montpellier Danse

  • Écrit par : Romain Rougé

2019Par Romain Rougé - Lagrandeparade.com/ De reports en annulations, attendue depuis trois ans, le chorégraphe israélien et la compagnie ont (enfin) posé leurs valises à Montpellier. Pour beaucoup, « 2019 Â» était considéré comme l’événement majeur de la 42e édition du festival. Verdict.

Quand une Å“uvre est encensée par tous, admettons que ça peut avoir un effet repoussoir. Par esprit de contradiction ou parce qu’on peut (heureusement !) ne peut pas être tous d’accord. Allons-y franco, « 2019 Â» est une claque ! Une claque artistique, visuelle, une Å“uvre ardente qui pète de tous les côtés, vous laisse pantois, de laquelle on ne sort pas indemne. C’est un spectacle charnel qui s’éprouve, qui se voit plus qu’il ne se raconte. Que dire alors ? On peut évidemment évoquer la scénographie, brillante, qui force deux publics à se faire face, à se regarder, peut-être même à se toiser. Au centre, un podium sur lequel danseuses et danseurs d’une diversité clinquante vont faire le show. Leurs corps explosent sur un mix musical mêlant musiques traditionnelles israéliennes et arabes, du métal, du trap oriental (ah, ce fabuleux tableau sur « Maqlooba Â» de V.F.M. style !), jusqu’à déambuler sur la mélopée du chanteur tunisien Moshe Cohen… Les tableaux, les duos et les solos s’enchaînent, tous plus beaux et bouleversants les uns que les autres, mettant en lumière – autre tour de force - la singularité de chaque artiste (ils sont une quinzaine sur scène).
Et au milieu coule un monde…
La pièce elle, évoque un monde en pleine frénésie : l’éblouissante introduction, joyeuse et pénétrante, laisse place à des danseurs jonchés sur des talons aiguilles démesurés, faisant crépiter la scène avant de brutalement se zombifier, comme subitement déconnectés. L’atmosphère devient apocalyptique, pesante, ils avancent en slow motion, passent et trépassent, sacrifiés sur l’autel de robotisations dévorantes. Et nous, voyeurs, assistons et cautionnons ce monde, sans bouger. Le malaise est palpable. Quand les regards remplis d’amour ne sont plus que des yeux vitreux, quand les mouvements langoureux se changent en solos abyssaux, ça prend aux tripes, ça en dit beaucoup sur la condition humaine. Ces humains, justement, apparaissent et disparaissent, tentent de se (re)connecter ou de se dérober, deviennent déments, s’électrisent : rarement le monde ne nous aura paru si superbement schizophrénique.
Mais « 2019 Â», ce sont aussi des moments de méditations, d’apaisement de l’âme, nécessaires et tout aussi forts. Quand les artistes franchissent la frontière pour chercher du réconfort auprès du public, Ohad Naharin met en miroir leur puissance et leur vulnérabilité. Aussi intensément qu’ils s'exalteront à nouveau sur scène, morcelés, contorsionnés, se prenant pour des bêtes, mais toujours debout. « 2019 Â» est vertigineux de poésie, d’engagement, de virtuosité. Un chef-d’œuvre.

2019
Chorégraphie : Ohad Naharin

Avec : Chen Agron, Billy Barry, Yael Ben Ezer, Matan Cohen, Ben Green, Chiaki Horita, Sean Howe, Chun Woong Kim, Londiwe Khoza, Shir Levy, Adrienne Lipson, Ohad Mazor, Eri Nakamura, Gianni Notarnicola, Igor Ptashenchuk,
Yoni (Yonatan) Simon, Hani Sirkis, Amalia Smith

Lumière : Avi Yona Bueno (Bambi) / Son : David (Dudi) Bell

Costumes, stylisme : Eri Nakamura / Bijoux : Liron Etzion, Keren Wolf

Bande sonore et musique originale : Maxim Waratt

Décors : Gadi Tzachor

Musique : Uzi Rosenblat (accordéon), Noa Ayali (violoncelle), Card Games by Yarmi Kadoshi interprétée par Moshe Cohen, Locust Star par Neurosis, Boukyou par Hako Yamasaki, Hine ma tov umanaim par Moshe Yakobson, Bashana Haba`a – Ehud Manor/Nurit Hirsh, Ana le Habibi par Rahbani Brothers/Fairuz, Saibai par Hako Yamasaki, Maqlooba par V.F.M. style, You, Me and the Next War - Hanoch Levin/Maxim Waratt, LaKova Sheli – folk song, Caspian By Asadi

Conseil musical, mastering : Nadav Barnea

Assistant d’Ohad Naharin et Eri Nakamura : Ariel Cohen

Ce spectacle est dédié à Eliav Naharin (1927-2018)


Production : Batsheva Dance Company

Coproduction : Festival Montpellier Danse 2022

Avec le soutien du fonds pour les nouveaux spectacles de la Batsheva en Israël, et des amis de la Batsheva en Israël et à l’étranger

Avec le soutien de la Chleck Family Foundation (Boston), Zita and Mark Bernstein Family Foundation (Winnipeg), Robert de Rothschild (New York), Batsheva’s New Works Fund, the American Friends of Batsheva New Works Fund et plusieurs amis Israéliens et internationaux.

2019

 


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