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Evguénia Iaroslavskaïa-Markon : les derniers jours d’une vie

  • Écrit par : Serge Bressan

SeuilPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr/ Envoyée dans le camp des îles Solovki, Evguènia Iaroslavskaïa-Markon a été fusillée en 1931 parce que dissidente. Dans « Révoltée Â», elle raconte ses derniers jours de vie. C’est un livre-coup de poing. Surgi du néant, de l’horreur. L’écrivain français Olivier Rolin effectue des recherches pour son roman « Le Météorologue Â». Il s’est rendu dans les îles Solovki, ses yeux sont happés par une photo noir et blanc, un visage de face et de profil. Rolin poursuit ses recherches, tombe sur un document, un texte titré « Mon autobiographie Â» et signé Evguénia Iaroslavskaïa-Markon- l’écrivain français note : « Lorsqu'elle veut quelque chose, elle le veut jusqu'au bout, dans ses dernières conséquences. Lorsqu'elle pense quelque chose, elle le pense et le proclame jusqu'au bout, sans égard aucun pour le danger encouru Â».

Premières lignes du texte d’Evguénia Iaroslavskaïa-Markon : « Avertissement : ne soyez ni étonnés ni troublés par ma sincérité. En fait, je suis convaincue que la sincérité est toujours avantageuse pour l’homme car si noirs que soient ses actes et ses pensées, ils le sont beaucoup moins que ce qu’en pense son entourage… Â» Publié en français, le texte est titré « Révoltée Â»- c’est tout simplement le journal d’une condamnée. D’une femme née en 1902 à Petrograd dans la bourgeoisie juive et qui écrit : « Si je raconte tout cela avec tant de franchise, c’est parce que je m’attends de toute manière à être fusillée Â». Elle le sera en juin 1931 au « camp à destination spéciale Â» des îles Solovki, quelques mois après son mari Alexandre Iaroslavski…

Pour certains, Evguénia Iaroslavskaïa-Markon fut une pasionaria- parce qu’elle a cru en la Révolution, au grand soir. Elle a bousculé les dogmes, tenté les extrêmes et la radicalité. Selon elle, une révolution ne peut venir que des pauvres, des très pauvres et des voyous… Alors, elle a fréquenté les paumés, les caïds et leurs hommes de mains, les prostituées, elle a été diseuse de bonne aventure, elle a volé. Et cette Révolution d’octobre 1917 qui l’a tant attirée, elle va la combattre au nom de toutes les libertés et de l'Anarchie: « La notion même de révolution figée dans la victoire est absurde, tout comme celle de mouvement arrêté : si c’est arrêté, ce n’est plus une révolution ! Le régime existant, même le plus progressiste, ne peut en aucun cas être révolutionnaire car il tend à se conserver, et non pas à s’effacer… » Elle se marie avec Alexandre Iaroslavski, poète et romancier qui ne prise guère le régime communiste. Trois mois après le mariage, elle tombe d’un train- elle sera amputée des deux pieds. Dissidente, elle sera envoyée dans ce camp des îles Solovki où elle écrit : « Une serpillère sale n'est pas coupable d'avoir à nettoyer les toilettes, mais quand ladite serpillère offense la vue, on est obligé de la jeter à la poubelle Â». Elle y sera fusillée. A 29 ans…

Révoltée
Auteur : Evguénia Iaroslvaskaïa-Markon
Editions : Seuil
Parution : 2 février 2017
Prix : 16 euros

 


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