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Peine perdue : C’est l’histoire d’un mec...

  • Écrit par : Valérie Morice

KentPar Valérie Morice - Lagrandeparade.com/ C’est l’histoire d’un mec, « musicien-mercenaire Â» marié à une artiste de street-art, qui se demande pourquoi lorsque cette dernière meurt accidentellement, s’opère en lui un « déni de décès Â». Un mec prénommé Vincent Delporte, qui se persuade dans un premier temps que sa désaffection, son manque d’empathie et de tristesse sont dus au fait qu’inconsciemment, il ne l’aimait peut-être plus.
Pour s’en persuader encore un peu plus, il va dès lors rejeter sur elle tous les échecs auxquels il fera face : son manque de style vestimentaire ? Faute de Karen qui décidait pour lui de sa garde-robe. Le voilà donc en homme soumis et bien dressé. Son manque d’argumentation ? La faute de Karen. Sa mélancolie ? Karen ; sa déchéance physique, ses crises d’angoisses nocturnes, sa médiocrité au lit ? Karen… ses badinages, son incapacité à vivre seul ? Karen…
Mais Vincent va très vite réaliser, alors que les tournées reprennent (il est musicien pour Kevin Dornan, un chanteur au succès grandissant) que la solitude, les rencards d’une nuit à l’hôtel avec des filles de passage, faire le pilier au bar, ne feront que masquer une réalité jusque-là refoulée : Karen de son vivant « comblait un grand vide au-dessus duquel il avait tendance à se pencher dangereusement. Â»
Perpétuel adulescent, quinquagénaire (« l’âge du pastis Â» comme il dit), nostalgique, n’assumant pas son âge, Vincent tente de renouer avec d’anciennes conquêtes, pour se prouver qu’il n’est pas totalement mort de l’intérieur, que sa vie n’est pas « une savonnette qui lui glisse des mains Â».
C’est l’histoire d’un mec qui, de désillusions en désillusions, de confidences en confidences, à la recherche perpétuelle de cette « peine perdue Â» finira par comprendre que c’est pour ne pas souffrir qu’il noircissait le tableau, jusqu’à la découverte fortuite d’une boucle d’oreille appartenant à Karen. Tandis que Vincent commençait tout juste à se relever et à retrouver un certain équilibre psychique, cette boucle d’oreille en forme de petit squelette (clin d’œil à la couverture), va venir tel un grain de sable enrayer les rouages de sa stabilité affective et amener un nouveau rebondissement au roman, même si au fil des pages, on en imagine progressivement l’issue, à l’aide d’indices habilement semés.
Kent, ancien chanteur du groupe Starshooter dans les années 70, ancien dessinateur au magazine Métal Hurlant, écrit ici son 8ème roman et confesse être parti d’une expérience personnelle pour en élaborer le scénario.
Son personnage de Vincent pourrait être un lointain cousin de celui de Vernon Subutex de Virginie Despentes, un musicien vs un disquaire tous deux sur le déclin, tentant désespérément de remonter une pente à 90%, deux protagonistes d’une espèce de génération perdue en quête du passé, qui semble être leur seul salut.
C’est l’histoire d’un mec face à face d’un mec avec sa solitude et c’est musicalement bien d(écrit).

Peine perdue

Editions : Le Dilettante
Auteur : Kent
192 pages
Prix : 17,00 €
Parution : 2 janvier 2019





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