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C’est bizarre l’écriture : Ecrire et vivre intensément

bizarrePar Christian Kazandjian - Lagrandeparade.com/ C’est bizarre l’écriture fait entrer dans l’univers de Christiane Rochefort, en prose et en musique. Lit-on encore Christiane Rochefort, aujourd’hui ? Apparemment peu, si on se réfère aux étagères des librairies, où il est rare de trouver un de ses livres.

Que s’est-il passé alors que la mémoire collective est capable de citer ses romans les plus connus : Le Repos du guerrier, prix de la Nouvelle vague en 1958, Les Petits enfants du siècle, Printemps au parking ou La Porte du fond, prix Médicis en 1988. Serait-ce que ces livres abordent des sujets obsolètes ? Futiles ? Inutiles ? Que nenni ! Novateur, iconoclastes, à l’époque, ils le sont demeurés. Le verbe reste précis, inventif, sachant passer de l’humour et l’ironie, à l’émotion. C’est précisément d’écriture dont il est question dans C’est bizarre l’écriture. Chez Christiane Rochefort, le mot, sa force propre, précède l’idée. Elle s’ingéniera à trouver le mot juste, celui qui porte et entraîne l’imagination. Elle aima en inventer ou en détourner le sens. Pour : « écrivain », qui, à son époque, n’avait de féminin, elle proposa : « écrevisse ». Ces jeux de langage lui permirent d’investir le champ de l’humour, de l’insolite et du poétique.

Une feuille qu’on noircit

Elles sont deux comédiennes-chanteuses-marionnettistes qui vont tour à tour entrer dans la peau de l’auteure, des lecteurs, des amis, du public. La vie de Christiane Rochefort, ses écrits vont s’imprimer, à l’aide de stylos-feutre et de rétroprojecteurs, sur la longue feuille blanche qui illumine la scène. On saura tout et un peu plus de cette femme qui choisit la littérature, sans négliger de sortir de la tour d’ivoire où seraient censés vivre les écrivains, pour affirmer « le droit à l’insoumission » durant la guerre d’Algérie, ou pour militer au MLF et, en 1971, pour participer, avec Simone de Beauvoir, Gisèle Halimi, Jean Rostand, à la création du mouvement Choisir la cause des femmes. On écoute des extraits de l’œuvre, des témoignages d’amis et proches, on balance, avec l’écrivaine morte en 1998, au rythme des chansons qu’elle aimait écouter, celles de John Lennon ou de Bob Dylan. On partage ses colères, ses réflexions sur l’architecture l’urbanisme, sur l’écologie, bien avant que le terme ne devienne une cheville obligatoire dans les discours politiques de l’heure.

Chanter, écrire

Awena Burgess, belle interprète des « songs » et Orit Mizrahi, qui signe la mise en scène, se démultiplient sur scène, domestiquant la figure tutélaire de l’écrivaine dont elle dévoile l’intimité. Appliquant la sentence de Verlaine : « de la musique avant toute chose », elles font instrument de tout : clavier de machine à écrire, froissements de papier, gerbe de stylos en bocal façon maracas, y ajoutant la voix. Les éléments de décor, dans leurs mains de marionnettistes, changent de fonction. Un beau spectacle, mené tambour battant, mais avec son lot d’émotions, qui donne envie de (re)lire Christiane Rochefort qui comme, à la même époque, Violette Leduc, Albertine Sarrazin portèrent haut la parole des femmes, n’hésitant pas à parler de sexualité, de désir, des corps, sans affèterie, avec des mots crus quand nécessaire. Un langage vrai.

C’est bizarre l’écriture

Texte : Christiane Rochefort
Publié aux éditions Grasset, iXe, Stock
Adaptation : Awena Burgess, Orit Mizrahi
Mise en scène : Orit Mizrahi
Comédien(s) : Orit Mizrahi, Awena Burgess
Musique : Awena Burgess Daniel Mizrahi
Lumières : Gérald Karlikow
Décors : Jean-Baptiste Manessier

Dates et lieux des représentations : 

- Jusqu’au 27 avril 2020 à Les déchargeurs, Paris 1er (01.42.36.00.50), les lundis.

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