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Black projet, ou les aventures de Richard et ses poupées : une nouvelle page du 9e Art

Black projectPar Guillaume Marcenac - Lagrandeparade.fr/ En quête de compagnie féminine, Richard, un ado d'âge indéterminé (probablement 13-14 ans), se met en tête de confectionner une poupée à taille humaine, pour partager, converser, et - pourquoi pas - expérimenter. Évidemment, il doit tout faire pour que son entourage n'ait pas connaissance de cette "bizarrerie". Richard travaille donc en secret, à base d'objets et matériaux de récupération - constituants de ses futures poupées-, et en redoublant de ruse pour camoufler son matériel dans sa chambre ou ailleurs.

Ainsi, naissent successivement, au gré des mésaventures conduisant à la disparition des prototypes successifs : Laura, Charlotte, Melissa, Jessica...

L'inventivité et l'abnégation de Richard n'ont pas de limites, et les assemblages se font de plus en plus réalistes : ainsi la première poitrine, en pamplemousses, est délaissée au profit d'une paire de petits coussins brodés (par Richard lui-même), et la tête en ballon de baudruche (recouverte d'une photo collée) fait vite place à de nouvelles merveilles d'ingéniosité de l'adolescent.

En filigrane de l'aventure intime et personnelle de Richard, se dessine son éloignement de plus en plus marqué de sa famille et de ses amis. Naïveté et bienveillance de l'enfance se teintent de la ruse et de la méfiance de l'adolescence. Tout particulièrement dans le quotidien de Richard qui commence à mener une double vie : la visible, avec son entourage, et l'invisible, avec sa poupée.

En deux mots, Black Project est une authentique pépite : savoureuse et captivante. Pour son humour décalé - dérangeant, mais touchant et humain -, pour son style virtuose - les écrits virevoltent d'une vignette à une autre, elles mêmes étant au service de la narration par leurs formes, enchaînements et juxtapositions -, et pour sa technique - enfin - incroyable dans son sens le plus étymologique : Gareth Brookes a utilisé linogravure et broderie pour réaliser Black Project. Quatre ans de travail armé de fil, aiguilles et outils de gravure. La technique artisanale de la linogravure consiste en effet à évider le bois pour enlever les futurs blancs, le reste de la plaque étant destiné à être encré en surface.

Le monde de la BD ne s'y est pas trompé, et Black Project a été gratifié de nombreux récompenses, dont le prix Broken Frontier du meilleur roman graphique et le meilleur premier roman graphique du concours Myriad.

Le futur lecteur sera peut-être déçu de devoir se contenter d'une impression sur papier (!), mais le tissage et l'ampleur phénoménale du travail réalisé par l'auteur sont visibles et bluffants. L'ouvrage original aurait d'ailleurs sa place au Victoria and Albert Museum de Londres, qui tient tant à coeur à Gareh Brookes. Et en toute objectivité, Black Project écrit un nouveau chapitre du 9e art.

Black Project
Editions : La Boîte à Bulles
208 pages
Prix : 22,00 €
Parution : Mai 2017

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