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La Cerisaie : une adaptation nostalgique de Gilles Bouillon

La Cerisaie Par Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Anton Tchekhov, nouvelliste et dramaturge, est connu pour ses descriptions, empreintes de réalisme, de la vie dans les campagnes russes de la fin du XIXème siècle. Ses pièces offrent des tableaux tragi-comiques d'une vie de province routinière et banale et révèlent le caractère éphémère de la petite noblesse russe. Les personnages sont des gens fréquentables et sensibles, ils espèrent que leur vie va s'améliorer, mais cela n'arrive pas souvent, car ils sont aux prises avec des sentiment d’impuissance et d'inutilité, d'un manque d'énergie et de volonté. S'il est possible de fuir cette léthargie, par le travail et l'action pratique, les personnages s'avèrent en général incapables ou sans réelle volonté de modifier cet état de faits. Théâtre sans véritable héros ni manichéisme, on y croise juste des êtres abîmés par les habitudes et l’usure du temps. Les histoires d'Anton Tchekhov narrent l'échec, les satisfactions avortées et les bonheurs dont on est dépossédé.

Ainsi, dans "La Cerisaie", comédie en quatre actes créée en 1904, Ermolaï Alexéïevitch Lopakhine, est un marchand issu d'une famille de moujiks, qui réussit à devenir le propriétaire du domaine des maîtres de ses ancêtres...pourtant sa réussite n'est accompagnée d'aucun plaisir car il ne peut la partager avec ceux qui viennent d'en être démunis, et notamment avec Lioubov Andréïevna Ranevskaïa, la dépensière, versatile mais généreuse propriétaire du domaine qui se sait acculée à vendre devant les dettes, et dont il reste secrètement amoureux. Tout dans cette pièce est baigné de non-dits douloureux. Les êtres se débattent entre un passé lyrique et poétique, empreint de tradition, et l'aspiration à un nouveau monde libertaire, poussé par le vent de la révolution.
Gilles Bouillon a choisi une scénographie au charme désuet. Par le truchement de jeux de draps, de déplacements de meubles et de changements de costumes, les actes s'enchaînent avec plus ou moins de vivacité...mais l'écriture d'Anton Tchekhov contribue pour beaucoup à cette impression d'alanguissement. Côté distribution? La rugosité de Lopakhine, les mondanités débonnaires de Gaev, la bienveillance du vieux majordome Firs, la fraîcheur de la jeune Ania, la discrétion élégante et soumise de Varia, l'évanescente fragilité et l'excentricité de Lioubov ou encore la fougue intellectuelle de l'éternel étudiant Trofimov expriment avec justesse la fragilité intrinsèque de cette Russie du XIXeme. "La Cerisaie" est le portrait douloureux, malgré les parenthèses rieuses, d'une société en mutation : entre un monde qui meurt et un autre qui nait. Au travers de cette comédie dramatique immobilière, se battent des idées antithétiques : la construction et la deconstruction, la jeunesse et la vieillesse, l'espoir et la résignation. Une pièce de facture classique qui séduira les amateurs du dramaturge et ne déplaira pas aux autres sans toutefois peut-être qu'ils en sortent enthousiasmés...

La Cerisaie d'Anton Tchekhov
Mise en scène: Gilles Bouillon
Assistante mise en scène: Albane Aubry
Traduction : André Markowicz et Françoise Morvan
Scénographie: Nathalie Holt
Peintures, décor: Thierry Dalat
Costumes : Cidalia Da Costa - Assistante : Dominique Chauvin
Dramaturgie : Bernard Pico
Univers sonore: Julien Baillod
Création lumières: Pascal di Mito
Habilleuse: Aline Froux
Maquillage & coiffure: Maël Jorand
Régie générale : Nicolas Guellier
Régie son: Édouard Bonnet
Régie plateau : Elsa Rebière
Avec Nine de Montal, Coline Fassbind, Julie Harnois, Barbara Probst, Emmanuelle Wion, Robert Bouvier, Thibaut Corrion, Dorin Dragos, Étienne Durot, Antonin Fadinard, Xavier Guittet, Roger Jendly.

Crédit-photo : Guillaume Perret

Dernières de la tournée 2015/2016 les 10 et 11 mars 2016 au Théâtre Jacques Coeur ( Lattes, 34970)

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