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Il y aura la jeunesse d'aimer : l'avenir de l'homme est la femme, comme disait Aragon

  • Écrit par : Guillaume Chérel

jeunesse d'aimerPar Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ « L'avenir de l'homme est la femme » : c'est le sous-titre au spectacle intitulé « Il y aura une jeunesse d'aimer », de Louis Aragon et Elsa Triolet, lu et joué par Ariane Ascaride et Didier Bezace (ce dernier assurant la mise en scène), que l'on connaissait, chanté par Jean Ferrat, dans la version : « La femme est l'avenir de l'homme... ». Sous-entendu, l'avenir de l'homme est l'amour, sujet principal de cette lecture / spectacle émouvante. Mais pas que...

Deux pupitres, deux chaises, deux micros, deux interprètes plus ou moins éclairés (la voix grave de Bezace dans le noir, les yeux fermés, c'est prenant) : on se dit que la soirée sera peut-être longue, malgré le talent des auteurs (Aragon/Triolet) et celui des interprètes. D'ailleurs, ceux-ci commencent doucement, comme pour se chauffer la voix. Puis on se laisse emporter par la poésie d'Aragon et la sincérité de Triolet. Le temps n'existe plus. On est envouté, transporté par la littérature, avant tout, il faut dire ce qui est. Certains textes sont connus et reconnus, d'autres pas. Ce sont souvent les plus drôles, ceux (en prose) où Ariane Ascaride et Didier Bezace peuvent enfin incarner et jouer, ne plus seulement dire et s'effacer derrière les auteurs, mais y mettre le ton et la gestuelle. Entendre Ascaride avec l'accent parigot, ça vaut son pesant d'olives ! De Provence... Elle qu'on a si souvent vue dans les sagas marseillaises de son compagnon Robert Guédiguian (« Marius et Jeannette », etc...). Elle est parfaite, et drôle, en épouse, façon Arletty, qui ne se laisse pas intimider par la police de Vichy. Pareil pour Bezace en « Riquet », prolo de paname, qui découvre que son nouvel ami de piscine (un certain Aurélien... qui se fait appeler Roger) est un « capitaliste ». Du coup, il le vouvoie et s'étonne qu'on puisse ne « rien faire comme un chômeur », en vivant de « ses rentes ». C'est la partie sociale, sans être politique, de certains textes engagés qui collent bien avec l'époque. D'ailleurs, le dernier texte, lu par la voix chaude de Bezace, est dédié à Jack Ralite, ancien ministre de la santé, grand amateur et connaisseur d'Aragon, qui s'occupait de la culture au Parti Communiste Français. Dont il disait qu'il démissionnait chaque soir et ré-adhérait chaque matin...

Cette lecture à deux voix est grandement consacrée à l'amour, nous l'avons dit, mais aussi à la vie de couple qu'ils vécurent ensemble : « Ensemble...Tout faire ensemble », souffle Elsa, avec humour, dans la bouche d'Ariane qui sait ce que c'est (la vie de couple). Elle dit aussi qu'elle « ne l'attendra pas », en cas de trop longue absence, elle prendra un amant. Il est toujours question d'Elsa... Encore d'Elsa. Jusqu'à son lit de mort. Les classiques abondent : « Les Yeux d'Elsa, « Elsa », « Le Fou d'Elsa », « Le con d'Els... » Oups ! Pardon : « le Con d'Irène »... Mais Elsa Triolet fut bien autre chose que « la muse de... ». Elle fut une écrivaine de talent (la première femme à recevoir le Prix Goncourt) et une combattante courageuse décorée après la victoire sur le nazisme. Le couple « d'où naît la beauté du monde » peut alors s'épanouir dans la sublime métaphore d'une humanité de l'avenir. Ariane Ascaride et Didier Bezace forment également un beau et bon couple d'interprètes, sur scène.

Il y aura la jeunesse d'aimer

De Louis Aragon et Elsa Triolet
Mise en scène : Didier Bezace, en collaboration avec Dyssia Loubatière
Avec Ariane Ascaride ert Didier Bezace

Dates et lieux des représentations: 
- Jusqu'au 2 décembre 2018 - Lecture spectacle au Lucernaire, à 21 h, du mardi au samedi, dimanche à 18 h. Au 53, rue Notre-Dame-des-Champs – 75006 Paris. Réservation : 01 45 44 57 34 / www.lucernaire.fr


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