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Adieu Mr Haffmann : un huit-clos à la fois intense, drôle, touchant et ambivalent

  • Écrit par : Xavier Paquet

AdieuPar Xavier Paquet - Lagrandeparade.fr/ 1942. Un foyer français. Une plongée dans le quotidien et la dure réalité de la France au temps du régime de Vichy. Monsieur Haffmann, bijoutier juif parisien se refuse à porter l’étoile jaune et propose à Pierre, son talentueux employé, de reprendre la boutique et de l’héberger en cachette pendant ce temps.

Celui-ci accepte, mais stérile, il exige en retour qu’il donne un enfant à sa femme. De cette étrange négociation, s’en suit un huit-clos troublant sur fond de guerre, de nazisme, d’occupation et de collaboration. Il met en perspective les rapports entre Pierre, dont le talent de sculpteur séduit jusqu’aux dignitaires nazis, son épouse à la fois femme emprise au doute et amante par « nécessité Â», et Monsieur Haffmann, caché dans sa cave, se sentant vivant dans les moments partagés avec le couple. L’intimité de leur histoire rencontre les affres de l’Histoire. La scène se décompose sur 3 espaces : le bureau de Monsieur Haffmann qui devient la cave dans laquelle il se terre, la cuisine comme lieu de vie du couple et une arrière-scène qui matérialise une contre-action en parallèle. L’ensemble est sombre, silencieux de prime abord pour mieux nous plonger dans le secret et la sensation de danger de l’époque. Les changements de lumière font varier les lieux ou la temporalité : le minimalisme du décor facilite l’enchainement rythmé de scènes courtes, nous maintenant sous tension. Ces courtes séquences de dialogues directs, ciselés et intelligents manient avec brio humour, tension dramatique, rebondissements et sous-entendus. Pour le metteur en scène, « le théâtre a pour devoir de proposer un langage de jeu extraordinaire que ce soit au niveau de l’engagement physique et émotionnel ou de la valeur du son, des silences et du rythme… Â» C’est ce qu’il propose avec une scénographie qui reprend les codes du thriller. Le jeu des acteurs sublime cette partition toute en sensibilité pour rendre ce huit-clos intense, drôle, touchant et ambivalent. La dégradation des relations et la peur sous-jacente renforcent le doute et la méfiance que chacun a envers l’autre. La scène finale, pierre centrale de l’intrigue, en est l’apothéose : comme un long plan séquence de cinéma, elle apporte du romanesque à la dimension satirique et dramatique qui s’installe. Habillement construite, la pièce ne catalogue pas les gentils, les méchants mais met en lumière le quotidien d’êtres humains cherchant avant tout à survivre avec une ambiguïté permanente qui les rend susceptible de basculer à tout moment. Cette pièce profonde interroge sur nos cas de conscience et notre morale personnelle : quelle aurait été l’attitude de chacun dans la quête d’identité, le dévouement et le sacrifice dans un contexte si difficile. Dans des temps qui se compliquent, elle résonne avec une grande modernité à l’actualité. « Faire en sorte que le courage soit plus fort que la peur Â».  


Adieu Monsieur Haffmann
De et mis en scène par Jean-Philippe Daguerre
Artistes : Grégori Baquet ou Charles Lelaure ou Benjamin Breniére, Alexandre Bonstein ou Marc Siemiatycki, Julie Cavanna ou Anne Plantey, Franck Desmedt ou Jean-Philippe Daguerre, Charlotte Matzneff ou Salomé Villiers

Dates et lieux des représentations:
- Jusqu’au 6 janvier 2019 au Théâtre Rive Gauche ( 6 rue de la Gaîté, 75014 Paris)
- Le 30 novembre 2018 à L'avant-scène (Les jardins de la Mairie, avenue d'Alsace Lorraine, 91550 Paray Vieille Poste)
- Le 27 mars 2019 à Espace Vaugelas (3 avenue du Docteur Boyer, 01800 Meximieux )
- Le 12 avril 2019 au Théâtre du Casino d'Enghien ( 3 av de Ceinture, 95880 Enghien Les Bains )

- Du 9 septembre au 23 décembre 2021 au Théâtre Tristan Bernard à Paris - du jeudi au samedi à 19h00 - les dimanches à 15h30


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