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Frantz : la complexité du remords et du pardon signée François Ozon

  • Écrit par : Julie Cadilhac

FrantzPar Julie Cadilhac - Lagrandeparade.fr/ Au lendemain de la guerre de 14-18, dans une petite bourgade allemande, Anna ( époustouflante Paula Beer) se rend quotidiennement sur la tombe de son fiancé, Frantz, mort sur le front en France. Un jour, elle surprend un jeune Français, Adrien, venu se recueillir sur sa tombe. Cette présence, suite à la défaite, déclenche des réactions épidermiques au sein des habitants de la ville. Adrien se présente comme un ami parisien du défunt : sa sensibilité à fleur de peau et son charme séduisent peu à peu les parents de Frantz et même Anna…

François Ozon brosse un portrait délicat et mélancolique d’un pays doublement meurtri : dans sa chair, avec les pertes de nombreux fils et pères, dans sa fierté, avec la signature d’une armistice cuisante. Dans un contexte franco-allemand d’animosité réciproque, l’arrivée d’Adrien dérange et agace. Les personnages de cette parenthèse historique fantasmée sont extrêmement séduisants car ils sont en proie à des émotions contradictoires : Hoffmeister ( justement interprété par Ernst Stötzner) est partagé entre ses colères patriotique et paternelle et ses valeurs humanistes intrinsèques; Anna cultive le souvenir d’un fiancé défunt à la mémoire idéalisée mais se sent tiraillée par des désirs aussi inespérés que culpabilisants; Adrien ( Pierre Niney excelle dans son rôle d’ancien poilu tourmenté) incarne la complexité du front à l’échelle individuelle…poussé par l’instinct de survie dans l’urgence des situations mais également capable d’élégance et de sentiments purs et fraternels.
Oscillant entre périodes en noir et blanc et en couleurs de manière étonnamment aléatoire, ce long-métrage est à saluer d’abord pour ses qualités photographiques. Au gré de toiles sensibles et nostalgiques, de gros plans qui font sens et jouent autant de l’acuité du sentiment d’un visage que de l’émotion d’une brise…la poésie de l’image s’impose comme fil conducteur de cette histoire de rédemption et d’amour.
La direction d’acteurs et les points de vue choisis déstabilisent les émotions du spectateur en ménageant des pistes d’interprétation erronées, qui éclairent les situations sous des angles troublants. François Ozon brouille les pistes pour mieux instaurer des tensions palpables entre les personnages. Eros et Thanatos, compagnons favoris des drames, se nourrissent ici aussi de la mort - épée de Damoclès- et de la vie qui reprend toujours le dessus.
Dans un microcosme allemand où la question de la responsabilité  pèse comme un couvercle, des cicatrices de guerre douloureuses que seul le temps pourra apaiser. Un fils pas si modèle, un meurtrier pas si coupable. En contrepoint, un tableau d’Edouard Manet exposé au Louvre : Le Suicidé. Des mensonges qui font vivre. Des vérités qu’on ne dira plus….et la délicatesse d’une larme en contrepoint de la dentelle.

Frantz
Date de sortie : 7 septembre 2016
Durée: 1h 54min
Réalisateur : François Ozon
Avec Pierre Niney, Paula Beer, Ernst Stötzner, Marie Gruber, Johann von Bülow, Anton von Lucke, Cyrielle Clair
Distributeur : Mars Film

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