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Les navigateurs de l’infini : un ouvrage fondateur de la science-fiction moderne

  • Écrit par : Sylvie Gagnère

miroisPar Sylvie Gagnère - Lagrandeparade.com/ J-H. Rosny Aîné est aujourd’hui encore très connu – ne serait-ce que pour sa Guerre du feu, adaptée au cinéma avec le succès que l’on sait. Les amateurs français de SFFF pensent également au prix littéraire de science-fiction de langue française qui porte son nom, et reste l’un des plus prestigieux de l’hexagone, avec à son palmarès Élisabeth Vonarburg, Roland C. Wagner, Ayerdhal, Sylvie Lainé, Estelle Faye ou Catherine Dufour (pour n’en citer que quelques-un·e·s).

Les navigateurs de l’infini est souvent considéré comme son chef d’œuvre. Dans ce roman, il décrit une mission d’exploration qui atterrit sur Mars, où elle découvre des races extraterrestres. Sur la planète rouge, les zoomorphes, des êtres étranges aux capacités inconnues, font face aux Tripèdes, dont l’espèce semble résignée au déclin et à la disparition, tant les zoomorphes envahissent leur habitat. L’arrivée des Terriens va cependant changer la donne. Lors de son retour sur Terre, l’expédition ramène avec elle deux Martiens. L’une d’elle est amoureuse de l’un des astronautes, qui le lui rend bien. Grâce au procédé de reproduction des Tripédes, quasi parthénogénétique, elle donne naissance à un hybride, qui possédera certaines des caractéristiques du père qu’elle souhaite lui donner.

Ce livre est avant tout une pièce historique, fondateur de l’ethno-SF, dans laquelle la xéno-population est décrite avec beaucoup de détails, qui englobent le physique, le mode de vie, les croyances, l’organisation sociale… Marquée par un humanisme profond (qui confine parfois à la naïveté), la morale de l’histoire est dans l’affirmation de la possibilité de se comprendre, voire de s’aimer malgré, ou grâce à nos différences.

Évidemment, la lecture demande de se remettre dans le contexte de l’époque (la première parution date de 1925) : les connaissances scientifiques ne sont pas les mêmes, et la vie sur Mars une hypothèse quasi plausible. Des astronautes petit-déjeunant de café et de pain beurré prête à sourire de nos jours, tandis que l’aspect « gentils hommes blancs qui viennent, grâce à leur avance technologique, sauver une civilisation Â» peut agacer. Toutefois, l’auteur est capable aussi de souligner l’incroyable beauté des Tripèdes, malgré leur physique très éloigné du nôtre et il ne les présente jamais comme « inférieurs Â» aux humains, seulement différents.

Écrit sous forme d’un quasi-journal de bord, le roman se lit facilement – même si quelques tournures sont bien obsolètes pour le lecteur d’aujourd’hui, et si l’abus de points de suspension s’avère parfois pénible. On peut lui reprocher sans doute un certain manque de rythme, une lenteur qui amenuisent son impact.

Il n’en reste pas moins que Les navigateurs de l’infini est un ouvrage fondateur, novateur dans bien des aspects – scientifiques bien sûr (l’« astronautique Â», les vivres comprimés, le champ « pseudo-gravitif Â» du vaisseau), mais aussi humains : l’auteur ne se contente pas de « petits hommes verts Â», il présente une vraie civilisation, sans anthropomorphisme et avec une audace remarquable pour l’époque (une histoire d’amour entre un terrien et une martienne !)

Les navigateurs de l’infini 
Auteur : J-H. Rosny Aîné
Éditions : L’Harmattan
Collection : Miroirs du réel
Parution : 18 février 2019
Prix : 22,50 €


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