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Yasmina Khadra narre les ultimes heures de Mouammar Kadhafi

La Derniere nuit du RaisPar Guillaume Chérel - Lagrandeparade.fr/ S’il y a bien un écrivain qui peut et sait écrire sur les conflits du Moyen-Orient et sur les dictateurs et autres fondamentalistes islamistes (entre autres…), c’est  Yasmina Khadra, de son vrai nom Mohammed Moulessehoul (il utilise pour son pseudonyme les deux prénoms de sa femme). Tout simplement parce qu’il les a combattus, dans les années 90, sur le terrain, ces "fous d’Allah", lorsqu’il était dans l’armée algérienne. Il sait de quoi ils sont capables, et incapables… Yasmina Khadra est en effet l'auteur de la célèbre trilogie contenant Les Hirondelles de Kaboul, L'Attentat (prix des Libraires) et Les Sirènes de Bagdad, vendue à des centaines de milliers d'exemplaires. Certains de ses titres : Ce que le jour doit à la nuit (meilleur livre de l'année 2008 pour le magazine Lire et prix France Télévisions) et L'Attentat ont été adaptés au cinéma. Cette fois, l’écrivain ambitieux met en scène Mouammar Khadafi et les ultimes heures qu'il a vécues (les dernières pages sont poignantes) dans son nouveau roman : La Dernière Nuit du raïs, paru aux éditions Julliard. Yasmina Khadra raconte l'histoire du chef de l'État libyen à la première personne du singulier. Son récit débute à Syrte, dans la nuit du 19 au 20 octobre, là même où le chef de l'État libyen a trouvé la mort. Ensuite, le roman se déroule par flash-back. La Dernière Nuit du raïs nous éclaire sur la face cachée d'un homme né sous le signe d'une injustice, qui voulut sauver son peuple mais ne fit que se substituer à lui. Sans projet de société probant, le tyran privilégia la répression la plus brutale, conjuguant purges sanglantes et démagogie claironnante.
Traduit dans trente-six pays, Yasmina Khadra a expliqué, lors du salon du livre de Bilbao, à un journaliste du Figaro, pourquoi il s'était intéressé à un tel personnage : « Les plus grands écrivains se seraient intéressés à Kadhafi. Tolstoï aurait aimé, Homère ou Shakespeare aussi. Et Rabelais aurait écrit une trilogie Pantagruel, Gargantua et Kadhafi! C'est un personnage de tragédie », a conclu le spécialiste des sujets « explosifs ». Si la modestie ne l’étouffe pas, il faut reconnaître que Yasmina Khadra a largement démontré qu’il faisait partie des écrivains qui comptent. C’est une plume rare et singulière, à la fois classique, par son style, et moderne, pour la thématique actuelle de ses romans. Un écrivain de la veine des raconteurs d’histoires. Pas des storytellers à l’américaine, faiseurs de best-sellers formatés pour le grand public, mais des écrivains engagés, disant le monde dans lequel ils vivent. C'est également un poète de la prose, de l’acabit de Stevenson et des Mille et Une Nuits. La plume de Yasmina Khadra est pleine de lyrisme, de sensibilité et de souffle. Il sait dire l’amour comme la mort et la langueur méditerranéenne, comme sa violence la plus extrême. Depuis Morituri, dans lequel un flic algérien, Brahim Llob, était aux prises avec la nomenklatura locale, il a fait du chemin. Récemment, il était revenu à ses premières amours, l'Algérie d'aujourd'hui, en dressant, avec Qu'attendent les singes (Julliard), un portrait sombre et déliquescent de son pays. La dernière nuit du Raïs n’est pas son meilleur roman mais il a le mérite d’être en phase avec le monde dans lequel nous vivons.

La dernière nuit du Raïs

Auteur : Yasmina Khadra

Editions: Julliard

250 pages, 19 euros

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