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L’enterrement d’un juif hongrois : une bouleversante et posthume déclaration d'amour

Juif hongroisPar Catherine Verne - Lagrandeparade.fr/ Une bouleversante et posthume déclaration d'amour. Le style en est élégant et sobre, soigné jusqu'à multiplier les relatives et autres propositions d'une seule phrase lancée sur autant de lignes qu'il faut au sentiment pour se dire et à la pudeur pour se taire. Inhabituel et reposant à l'heure de gloire du zapping littéraire et où la syntaxe romanesque prend parfois l'allure de pitchs pour reality show. L'histoire, elle, est simple: il s'agit d'amour. Mais de l'amour vrai, car l'histoire est vraie. On y apprend combien l'amour, quand il est aussi vrai, peut être justement simple face à l'adversité : l'auteur relate ici le vécu éprouvant de son mari et retrace certaines péripéties autobiographiques de leur union. Une union laborieusement admise par l'entourage car Annie et Emil se distinguent d'emblée par leur confession, leur origine, leur nationalité. Et ce n'est pas la moinde qualité de ce roman que de donner à entrer dans l'intimité des véritables amours, celles où l'on accueille tout de l'autre, de l'irréductiblement et radicalement Autre. Car l'amour, c'est le bonheur qu'il y a à rencontrer la différence et à savoir s'en augmenter. Au fond Catherine Paysan dresse ici un portrait universel : celui des amoureux qui toujours, relèvent les défis innombrables et toujours inconsidérés de ce qu'est aller à la rencontre de l'autre, du différent, de l'étranger à soi-même.

Au service de la démonstration, une langue française impeccable qui, dirigée par Catherine Paysan, renoue avec ses nuances académiques, sa souplesse et sa fluidité harmonieuses. Souple et fluide comme l'amour en somme: la simplicité ici aussi a le ton de l'évidence. Les souvenirs s'évoquent et se succèdent au fil d'une mémoire généreuse et tendre: ça ressemble à une de ces promenades au bras de l'aimé, telles que les affectionnait le couple après le souper, pour admirer les ciels. On se plaira donc à lire de ces vraies phrases de littérature par où certains écrivains se distinguent comme des valeurs sures.  On sent y virevolter la plume vive de la femme de 90 ans, et sans doute n'est-ce pas peu dire quand on sait cette dernière farouchement fidèle à l'exercice manuscrit. La tendresse de l'écrivain pour l'homme qui partageait sa vie est sensible au détour de chaque mot, et le choix de lui consacrer un ouvrage après son décès plutôt que de son vivant semble ancrer plus encore la force du sentiment dans ce que seule la grâce de l'écriture apporte aux serments amoureux : la promesse de l'éternité.

L’enterrement d’un juif hongrois
Auteur: Catherine Paysan
Editeur: Albin Michel
Parution: 2 janvier 2017
Prix: 25 euros

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