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Jay McInerney et Les jours enfuis : blues à Manhattan…

romanPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / On l’a surnommé le « golden boy » de la littérature américaine. A 62 ans, il est, présentement, un de ceux qui écrivent le mieux New York. Et le couple, aussi.

Il y a bon nombre d’années déjà, Jay McInerney avait éclaboussé le monde des livres avec « Trente Ans et des poussières » (1993). Quelque temps plus tard, il revenait avec ses héros, le couple Calloway, dans « Bright Lights, Big City » (1997). Et en ce printemps, le revoilà toujours avec Corrine et Russell Calloway pour « Les jours enfuis ». Le couple navigue dans la cinquantaine, leur mariage ne va pas fort, l’amour n’est plus qu’intermittences… Et, avant même de dérouler le nouveau moment de vie du couple, le romancier rappelle une citation de Richard Hell, le chanteur, compositeur, bassiste, écrivain poète punk américain et membre du groupe cultissime Television : « Chaque couple a son propre univers, et même à l’intérieur de sa bulle, le mystère reste entier »… 

On est à New York, cette ville dont, selon McInerney, « certains aspects de la vie sont parfaitement ridicules. New York est devenue une ville de riches, de moins en moins diverse mais elle reste la ville la plus intéressante du pays, que ce soit dans les arts, le journalisme, la mode… ou la littérature. Les jeunes gens continuent de venir vivre à New York pour écrire ». Avec « Les jours enfuis », on embarque pour Manhattan blues. Autrefois, écrit Jay McInerney, « New York, New York… ces lettres s’étalaient sur les couvertures, c’était la ville d’où provenaient les livres et les magazines. Et où se trouvaient toutes les maisons d’édition, les locaux du « New Yorker » et de la « Paris Review », là où Hemingway avait mis son poing dans la figure d’O’Hara, là où Ginsberg avait séduit Kerouac… » Manhattan blues… là où on retrouve donc le couple Calloway. Corrine. Russell. Ça tangue entre eux deux. Le mariage, leur mariage est aujourd’hui (à la fin des années 2000) une notion floue, c’est le temps du krach économique, l’Amérique puis le monde se sont pris en pleine figure la crise des subprimes. Corrine a eu un amant riche businessman, Luke McGavock- ça a duré quatre-vingt dix jours, et bosse bénévolement pour une association humanitaire qui aide les plus démunis. Russell est toujours éditeur ; « amateur enthousiaste » de vins, il écoute les Talkkinhg Heads quand il fait la cuisine. Et surtout, il a racheté une petite maison d’édition. Il va tenter des coups éditoriaux : éditer un jeune type inconnu venu du Tennessee, et publier (du moins, tenter de) les souvenirs d’un otage américain des talibans au Pakistan…
Avec les Calloway, la vie a perdu de son éclat. Oui, bien sûr, il y a des soirées de gala, des dîners dans les restaurants chic… mais le souvenir des jours enfuis dévore inexorablement Corrine et Russell. Ainsi, un jour, le plus sérieusement du monde, Russell pose la question- définitive : qu’est le plus exaltant, le sexe ou la pêche au gros ? Bon, malgré cette question existentielle, il est quand même tout près de suivre une jeune bombe atomique au Chelsea Hotel. Quant à Corrine, elle va tomber par hasard sur son ex-amant Luke- il vit six mois par an en Afrique du sud, il y exploite un domaine viticole, il y a épousé une jeune fille sportive.  
Evidemment, dans ce texte où résonnent des références à Francis Scott Fitzgerald et James Salter, l’auteur distille secrets et non-dits. Avec jubilation, il arrange les accommodements, et s’accommode des arrangements. Pointilliste, le romancier américain offre un texte où le sombre côtoie le vertige, la mélancolie la férocité. Mieux : avec « Les jours enfuis »- un roman aussi étincelant et éblouissant, Jay McInerney rappelle qu’il est un grand styliste. Pour notre plus grand plaisir…

Les jours enfuis
Auteur : Jay McInerney
Editions : L’Olivier
Parution : 11 mai 2017
Prix : 22,50 euros

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