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Fonny : Lieve Joris dit tout sur son frère…

JorisPar Serge Bressan - Lagrandeparade.fr / Un aveu. Qui transpire de toutes les pages. Lieve Joris, 66 ans, écrivaine belge née à Neepelt, globe-trotteuse et vivant à Amsterdam, avoue avoir là fait son voyage le plus exotique. Elle qui a voyagé et écrit sur la Syrie, la Chine ou encore le Congo confie, oui, que son voyage le plus exotique, c’est dans sa famille qu’elle l’a effectué. Et elle le raconte dans son nouveau livre, « Fonny ». Un texte dans lequel elle dit tout sur son frère, mais pas que… Il y a aussi le grand-père, le père et la mère, cette famille Joris nombreuse avec ses neuf enfants. En ouverture, on lit : « Mon père téléphone. En temps normal, il a déjà une voix de croque-mort mais là, elle est particulièrement sombre. Fonny a eu un accident. Avant-hier soir, le jour de son anniversaire. Il est dans le coma, aux soins intensifs ». Fonny, c’est le surnom d’Alfons, le frère. Le jour de son 42ème anniversaire, sa voiture est rentrée dans un arbre, « deux tonneaux. Fonny était sous influence, bien sûr, mais ça, mon père ne le précise pas »…

Une des plus brillants écrivains-voyageurs, une des plus réputés « non creative writers » (comme les appellent les Anglo-Saxons), Lieve Joris confie à un ami « rebelle » congolais : « Voici mon voyage le plus long et le plus lointain ». Elle écrit aussi : « J’ai beau avoir voyagé au fin fond du Congo et bourlingué seule dans les pays du Golfe, je ne suis pas armée contre la méchanceté de Fonny ». Fonny, son frère, son héros. Ce frère aimé et haï. Ce frère qui jouait avec sa famille, les parents, les frères et sœurs- aussi, avec les camarades de classe quand ils étaient ados…  Et puis, il y a eu le plongeon. Drogué, camé. La sœur date le début de l’addiction avec précision : « Autrefois, c’était un spécialiste reconnu de l’Iran, son farsi était phénoménal, il enseignait à l’université et avait une bonne plume. À Téhéran, il s’est mis à fumer de l’opium. C’était tellement bon marché et si facile à obtenir, toutes ses connaissances en fumaient. À Amsterdam, il arrêterait, bien évidemment. Mais lors d’un vol retour, il a eu des suées et, en moins de deux, a été contraint de chercher sa dose dans le quartier chaud… »
« Fonny » ou le roman d’un drame familial. Un drame que Gérard, le père, a toujours nié. Faut dire que chez ces gens-là, Monsieur, on n’dit pas. On ne prie pas plus. La famille se rassemble au chevet du blessé plongé dans le coma. De ce frère tant aimé, si décevant. De cet aîné aussi magnétique que tourmenté, aussi ballotté dans ses égarements que mû par une énergie qui peut se révéler (auto)destructrice. Ainsi, Lieve Joris a consigné. Emotions à tous les étages dans les conversations, les visites ou encore les péripéties de l’événement. Voyageuse de retour à la maison, elle explique : « Ça m’a pris quarante ans pour écrire sur ma famille… » « Fonny », un roman de l’intime tout en lucidité et courage…

Fonny
Auteurs : Lieve Joris
Traduit par Marie Hooghe
Editions : Actes Sud
Parution : 5 juin 2019
Prix : 22,50 €

Extrait:

« Quand ai-je parlé à Fonny pour la dernière fois ? Cela doit remonter à trois ou quatre mois. J’étais à Hasselt, Maman a composé son numéro et m’a tendu le récepteur. « Tiens, dis donc un mot à ton frère.
-Salut Fonny, comment vas-tu ?
-Tout doucement ». Sa voix venait de loin, comme s’il était enfoncé dans une pile de coussins. Son asthme lui faisait la respiration sifflante.
Soi-disant, il avait la grippe ou une laryngite, mais il était en manque évidemment. Je le sais maintenant, j’aurais pourtant pu m’en douter à ce moment-là ».

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